Ah, si les morts pouvaient entendre, voir, lire… probablement notre défunt camarade de Lyon se réjouirait d’avoir au moins, post mortem, soulevé un intéressant débat d’idées. Je reconnais totalement le bien-fondé de la position de notre camarade Christian, d’autant plus qu’il a souvent été confronté à la mort de nos anciens dans les organismes qu’il a dirigés. Je ne veux pas écrire de bêtises mais je pense qu’il a rédigé quelque 133 éloges funèbres pour ceux qu’il accompagnait jusqu’au « dernier bivouac ». C’est dire qu’il a de l’expérience en matière de comportements humains dans de telles circonstances et que son point de vue doit être reconnu comme légitime. Je savais aussi, par son entremise, l’action dévouée de visiteurs d’hôpitaux au profit de ceux des nôtres égarés, volontairement ou non, dans la vie, ainsi s’applique sans contraintes l’ancien adjudant-chef Jean-Jacques Basile. C’est pourquoi je précise que le propos de ma dernière lettre n’était pas de distribuer de bons ou mauvais points à untel ou à tel autre, mais simplement d’attirer l’attention sur un cas particulier. Dans un tout autre domaine, pour illustrer ma position, il me vient à l’esprit un assez vieux souvenir qui, à mon sens, présente une certaine analogie avec le cas présent :

« Commandant d’unité dans un régiment outre-mer où j’avais, quelques années auparavant demandé et obtenu qu’il n’y ait plus de kermesse à l’occasion de Camerone   pour diminuer les charges du personnel, tous faisaient un effort pour que la tombola du même nom soit un succès et remplace financièrement la kermesse. J’avais décidé que les légionnaires et caporaux devaient acheter un carnet de tickets, les caporaux-chefs deux, les sous-officiers trois et les officiers cinq, y compris ceux de l’état-major. La solde OM et le petit prix des tickets justifiaient cette décision. Mon Adjudant de compagnie est venu me voir pour me dire que le sergent-chef X refusait d’acheter quoi que ce soit car aucun règlement ne l’y obligeait... Soit. Je l’ai fait convoquer au rapport pour le lendemain. Sûr de son fait, il s’est pavané quelque peu à la popote, conscient et certain, à juste titre, que je ne pouvais le sanctionner.

Après sa présentation réglementaire, je l’ai laissé au garde-à-vous pour lui poser cette simple question : - Le jour où tu t’es engagé à la Légion combien t’a-t-on fait payer le premier repas ? Il m’a répondu : « Rien mon capitaine ». – Tu peux disposer. Dans l’après-midi l’adjudant de compagnie me rendait compte que le sous-officier en question avait acheté les trois carnets de tickets. Une simple phrase lui avait fait comprendre le devoir moral d’être solidaire de ses camarades. »

AM

Bien entendu que je suis en accord parfait avec les propos d’Antoine, je pense, pour répondre à ce message lancé sur le net, que c’est avant tout un problème de société et de manque de communication. Nous connaissons bien ce rejet de notre communauté pour ceux qui ne sont pas dans le moule qu’impose à l’imagerie populaire: "l’ancien légionnaire en blaser bleu marine et béret vert vissé sur la tête". Personne, à priori, ne saurait accepter le rejet et le mépris d'un ancien légionnaire par l’amicale implantée dans le secteur géographique de celui-ci.  C’est contraire à notre discours de solidarité qui fait la force de notre honorable famille d’anciens légionnaires où dit-on la Fidélité est une devise immuable. Dans ce genre de cas,  reste à contrôler un fort sentiment d’impuissance et devant cette misérable situation, aucune solution ne se présente, l'indifférence ne saurait être une solution.

Quant un de nos camarades n’est pas concerné par  la présence d’Anciens légionnaires à ses obsèques quand il s’agit de ne pas être concerné quant à rendre un dernier hommage à cet Ancien, parce-ce qu’il n’avait pas sa “carte du parti”… Que dire… J'ai en mémoire qu'une amicale était indisponible pour les cérémonies funéraires de ses propres membres les jours des vacances d’été… pensez donc, personne de disponible pour porter le drapeau…  Heureusement, ce n’est pas la règle (surtout en cette période), loin s’en faut !

Je disais aux pensionnaires de Puyloubier puis à ceux d’Auriol, que “je ne saurais imposer à quiconque de venir à l’inhumation d’un camarade décédé, dès l’instant où ils ne le souhaitent pas, participer par obligations à une cérémonie mortuaire n’est tout simplement pas acceptable. Si d'aventure je devais rester seul devant le cercueil d'un de vôtres, je le ferais avec "Honneur et Fidélité".

Un homme qui a servi, une partie de sa vie, à la Légion aurait-il des droits à sépultures réglementées ? Je considère que dès l’instant où il a porté le "Képi Blanc", nous ne pouvons rester indifférent ! Il est vrai que souvent l’information vient trop tard. Il n’y a pas si longtemps, une note précisait qu’un ancien directeur du Foyer d’Entraide et de Puyloubier avait "droit" à un piquet d’honneurs pour ses obsèques; mais qui se souviendra de lui comme Directeur ? Donner un ordre par note de service permanente, ne peut qu’être concrétisé par l’inutilité, tant l'ordre est voué à l’oubli. 

Notre ancien de Lyon avait fait un choix en refusant tout contact de son vivant avec l’amicale lyonnaise et ce n’est pas l’AALP à laquelle il était inscrit qui pouvait porter remède à la chose… Il reste évident que les Amicales d’Anciens légionnaires n’ont d’autres devoirs que celui du but inscrit dans leurs propres statuts et sont de ce fait indépendantes et libres.

Quant à L’amitié proprement dite, quelle soit légionnaire ou autre,  elle ne saurait se réaliser sans échange réciproque et ne saurait se contenter d’une seule direction, un sens unique en amitié ne peut qu’être une incontournable impasse à tout épanouissement durable...

Le débat ne saurait être clos, chacun détient sa vérité et proclamer avec force et autorité ses convictions sur un sujet aussi délicat n’est pas toujours des plus constructifs. Il ne faudrait pas que le débat s’anime autour d’impulsions incontrôlées, conséquences de l’absence du recul indispensable à toute salutaire décision.

Pour l’heure, il n’y a aucune leçon à recevoir, ni surtout à donner, seul existe un fait incontournable : « on n’abandonne pas les siens, un point, c'est tout ! ». Le reste ... tout le reste, les sautes d’humeur, les interprétations, les colères, ne peuvent n'être que verbiages inutiles, tout être humain mérite considération et celà ne se négocie pas ! A votre réflexion…

CM