Le légionnaire est par nature un voyageur, il consacre beaucoup de temps à voyager. C’est pour moi un temps qui court. J’ai toujours essayé lors de mes affectations à fuir le temps, toujours il m’a pourchassé, jamais telle mon ombre, il n’a arrêté sa filature. Quand je pensais l’avoir semé, il m’a précédé, il m’attendait plus loin…

Hors Métropole, je constatais, à mon grand désarroi que je n’avais pas besoin d’une montre pour savoir l’heure qu’il était, mystère? J’aspirais souvent arriver en retard à certains rendez-vous incontournables au quotidien, rien à faire, j’étais conditionné, j’étais toujours à l’heure, un vrai chemin de fer d’avant nos temps modernes et des TGV…

Pendant mes voyages, il est une remarque banale que je faisais, celle de voir les manoeuvres du temps qui place le déplacement du temps dans l’espace. Ernst Junger explique: “Sur les bords de notre espace, les aiguilles du temps modèrent souvent leur marche et les ustensiles, les modes et les coutumes s’usent plus lentement.

J’ai grace à la Légion, fait plusieurs beaux voyages, mais j’en ai perdu un bon nombre échappés de ma mémoire.

Ainsi de la Guyane mon esprit retient surtout l’image de cet oiseau-mouche vert satin qui tremblait comme un fou devant une fleur hibiscus de mon jardin. Pourquoi?

 

J’en ai d’autres qui d’une manière incompréhensible sont bien ancrés dans ma tête, à ma grande surprise tant ils étaient d’une banalité insignifiante, en Suisse, en Belgique, ils s’accrochent, rebelles et rien à faire pour les déloger.

 

D’autres sont embrouillés, ils sont en désordre mais ils m’accompagnent partout comme de vieux copains, je ne sais les ranger.

Je me suis aperçu que je pensais avoir, de par mes nombreux séjours à l’étranger emmagasiné de quoi écrire un livre, si celui-ci devait voir le jour, il faudrait que je conduise mes voyages dans ma chambre. Jean Giono comme jules Verne, n’ont jamais quittés leur ville, Manousque pour l’un et Amiens pour l’autre.

Jean Giono a croisé tous les océans, essuyé vingt et un cyclones et conduit des caravanes dans le désert.

Mais compte tenu que le temps, les voyages et ma mémoire me font aujourd’hui faux bonds, je décide de me séparer d’eux à l’amiable, je me contenterai, , le temps que ma crise de retraité passe, de suivre les conseils de Jean Giono en relisant le “Manuel d’Instruction nautique”, de quoi m’ioder et redémarrer la marche du temps qui passe.

CM