Janvier 1941 : Guerre entre la France et la Thaïlande.

  • 5 janvier : un détachement mixte de tirailleurs du IV/3e R.T.T. et des légionnaires du I/5e R.E.I. détruit le poste de Campong Sia, tenu par des fusiliers marins thaïlandais. La mèche est allumée.
  • 10 janvier : les Thaïlandais passent résolument à l’offensive. Au Laos, ils occupent la rive gauche du Mékong très peu gardée. Au Cambodge, ils contraignent le dispositif français sur la R.C.1 à se replier. Saïgon ne peut pas ne pas réagir. Sept bataillons d’infanterie, dont les I/5 et III/5e R.E.I., plusieurs batteries d’artillerie, un détachement motorisé sont regroupés en vue d’une contre-offensive à l’ouest de Sisophon.
  • Les possibilités françaises, sur le fond, pêchent par faiblesse générale. La troupe manque d’entraînement. Le matériel accuse son âge. L’aviation est quasiment inexistante.

  • 16 janvier : les démêlés avec les Japonais réveillent les appétits territoriaux du Siam qui se livre à des attaques sur le dispositif de couverture, le long du Mékong et à la frontière du Cambodge. Stoppé au Tonkin, l’Empire du Soleil Levant encourage le Siam à exercer son hégémonie sur toutes les régions thaïes de l’Indochine française. Les troupes siamoises, très bien armées, lancent leur effort le 16 janvier dans le secteur de Phoum Preav. Redoutable par son nombre, l’armée siamoise est dotée d’un armement moderne dont l’a abondamment pourvue le Japon ; elle est soutenue par une aviation active et disposant d’une flotte importante. Lors de la guerre franco-thaïlandaise, le 3e Bataillon du 5e R.E.I. du commandant Belloc combat au Cambodge, près de Battambang et le 1er bataillon près de Pailin.

Légionnaires morts au combat.

  • Le 3e bataillon reçoit le gros du choc ; pendant plus de huit heures, les compagnies soutiennent une lutte inégale. Un combat violent oppose les légionnaires à deux bataillons appuyés par des chars et de l’aviation. Les armes automatiques crachent à bout portant. Un escadron de chars décime la section du lieutenant de Cros Peronnard. L’intervention des deux canons de 25 et celui de 75 de la C.A. sauve la situation. Le canon de 25 détruit un char en trente secondes. Un deuxième puis un troisième char sont atteints : l’adversaire est forcé à se replier. Dans cette lutte inégale, une fois encore, l‘héroïsme de la Légion sauve la situation. La section de mitrailleuses d’Helmreich prend de front et d’enfilade, à 200 mètres, les fantassins siamois qui tentent de déboucher et les cloue sur place. C’est la troisième attaque qui échoue depuis le matin devant la ténacité des légionnaires. Dans la brousse de nombreux cadavres sont couchés.

Légionnaires prisonniers...

  • Devant la résistance du Régiment du Tonkin, les agresseurs se replient. Le 3e bataillon déplore une vingtaine de tués dont le capitaine Marcel Chalvidan et le lieutenant Guy de Cros Perronard, et une dizaine de blessés. Les pertes ennemies sont au moins de 300 tués.
  • Ce résultat heureux ne dissimule pas l’échec global de l’offensive terrestre française. Seul bilan positif immédiat, l’avance ennemie en territoire cambodgien est enrayée.

  • 17 janvier : la victoire vient de la mer ; la petite escadre du capitaine de vaisseau Bérenger envoie par le fond, au large de l’îlot de Koh-Chang, un bon tiers de la flotte thaïlandaise. Cette victoire navale donne à la France l’avantage.
  • Craignant pour son allié siamois, le Japon impose sa médiation. Il fait cesser le feu adverse et préside à des négociations où le plus retors a le plus de chances de s’imposer. Toutefois le sacrifice des bataillons de la Légion n’a pas été vain car les territoires cédés sont hors de proportion avec les prétentions de l’adversaire qui venait d’essuyer une cuisante défaite navale.

  • 31 janvier : l’armistice est signé par l’amiral Decoux, commandant en chef, à bord du cuirassier nippon Natori. L’armée française en Indochine est pauvre, en effectifs et surtout en matériel. Les Japonais imposent leur médiation des territoires sont arrachés au Cambodge et au Laos : l’Indochine perd au Laos une partie de la rive droite du Mékong, au Cambodge, la province de Battambang et la moitié de celle de Seim-Reap (Ces territoires seront restitués après la guerre).
  • Les combats avec les Thaïlandais confirment les enseignements de Lang Son. Les unités à base d’autochtones, insuffisamment encadrés, vacillent aisément. La Légion, par contre, garde son calme et sa solidité. Point important après la fausse note de Lang Son : les légionnaires d’origine allemande (30% de l’effectif) n’ont en rien démérité et n’ont pas été influencé par la propagande nippone en sous-main. Les I/5 et III/5 repartent au Tonkin avec le sentiment du devoir accompli.
  • Le PC du régiment revient à Viétri. Le I/5e R.E.I. retrouve Tuyên Quang, le II/5e R.E.I., est à Dap Cau, le III/5e R.E.I. à Sept-Pagodes et le détachement motorisé à Lang Son.

Les progrès de l’influence japonaise comme le cessez-le-feu imposé dans le conflit franco-siamois sont autant de reculs qui font perde la face aux Français aux yeux des Vietnamiens.

Jean BALAZUC P.P.P.P.

Septembre 2023

Sources:

La Légion Etrangère de Douglas Porch-1994.

La Légion Etrangère. Voyage à l’intérieur d’un corps d’élite. De John Robert Young et Erwan Bergot – Editions Robert Laffont 1984.

La Légion étrangère. Foreign Legion 1939-1945. de Pierre Dufour – Editions Heimdal 2000.

Histoire de la Légion de 1831 à nos jourss du capitaine Pierre Montagnon – Pygmalion 1999.

Wikipédia

Site de la Mémoire des hommes du S.G.A.

Site du Mémorial de Puyloubier.

Belloc:, commandant, chef du bataillon III/5e R.E.I. lors de l’attaque siamoise du 16.01.1941 ; promu lieutenant-colonel en 1944, chef de corps du 5e R.E.I. dont le P.C. est à Vietri, fait prisonnier à son domicile lors de l’attaque japonaise du 9 mars 1945 ; il est jeté dans une ancienne fosse à chaux.

Bérenger: capitaine de vaisseau, commandant la petite escadre qui envoie par le fond, au large de l’îlot de Koh-Chang, le 17.01.1945, un bon tiers de la flotte thaïlandaise.

Chalvidan Marcel Camille: né le 15.01.1905 à Nîmes dans le Gard ; capitaine au III/5e R.E.I. ; mort pour la France le 16.01.1941 dans les combats de Plum Preav au Cambodge contre l’armée siamoise.

de Cros Peronard Guy Félix Adolphe: né le 20.01.1906 à Copenhague au Danemark ; lieutenant au III/5e R.E.I. ; mort pour la France le 16.01.1940 à Rhum Reac dans les combats de Plum Preav au Cambodge contre l’armée siamoise.

Decoux Jean: né en 1884 ; amiral ; il succède au général Catroux ; commandant en chef des troupes françaises en Indochine en 1940 ; les Japonais le conduisent les menottes aux poignets, dans les rues de Saigon ; ils Japonais l’emprisonnent avant de le forcer à coopérer avec eux , notamment pour le statut des Français dans l’Indochine occupée ; nommé par le Maréchal Pétain Gouverneur Général en Indochine en 1942 ; de retour en France en 1945 ; il est traduit devant la Haute-Cour de Justice pour trahison ; il obtient un non-lieu le 17.02.1949 ; décédé en 1963.

Helmreich: chef de la section de mitrailleuses du III/5e R.E.I. lors de l’attaque siamoise du 16.01.1941