F130 : la Légion au Maroc en 1912 : le Protectorat avant la Grande Guerre.

30 mars 1912 : la France impose un traité de protectorat à Moulay-Hafid, Sultan du Maroc.
• Le Sultan se place sous la protection de la France. La France s’engage ‘’à prêter un constant appui à sa Majesté Chérifienne contre tout danger qui menacerait sa personne ou son trône ou qui compromettrait la tranquillité de ses états’’.
• Par le traité de Fès, la France institue un poste de Résident Général. Cependant, la France reconnaît à l’Espagne deux zones d’influence, le Rif et Ifni ; enfin, Tanger est placé sous contrôle international.
• L’Angleterre et l’Italie entérinent, moyennant liberté d’action en Egypte et Libye.


• A Fès, des agitateurs transforment la nouvelle : les Français vont emmener le Sultan prisonnier puis les Marocains deviendraient leurs esclaves.
• Le quartier juif, le Mellah, est pillé puis brûlé.
Le 05.04.1912, la Légion Etrangère perd à Ouldjet-Soltane un officier, Esperaber.
Le 09.04.1912, la Légion Etrangère perd en Corse un officier, Bisciglia, blessé lors des combats au Maroc.
Le 10.04.1912, la Légion Etrangère perd le capitaine Doreau du 1er Etranger à Nekhila
15 avril 1912 : massacre de Français suivi d’un pogrom à Fès.
• Le 7 avril, un officier français est tué par un Marocain, lui-même abattu ; c’est le point de départ d’une chasse aux Français et…comme très souvent, aux Juifs.
• Le 17 avril, 68 Européens, habitant Fès, sont massacrés par les Berbères qui dévalent de leurs nids d’aigles en brandissant fusils et poignards.
• Parmi les victimes, 16 officiers et instructeurs français des Tabors chérifiens mis à la disposition du sultan Moulay Hafid et massacrés par les Tabors chérifiens révoltés.
• L’armée française réagit et arrive à arrêter la tuerie de ses propres ressortissants.
• Les émeutiers se replient et se dirigent vers le quartier juif, le Mellah où plus de 10 000 Juifs habitent, leurs dirigeants étant accusés d’avoir favorisé la venue des Français. C’est le pogrom. Des dizaines de Juifs sont massacrés, hommes, femmes et enfants. Des femmes et des fillettes sont violées, des enfants enlevés. Les maisons sont saccagées, certaines incendiées. Les malheureux habitants s’enfuient de ce quartier ; 2 500 se réfugient dans les cours du palais du Sultan et dans sa ménagerie où ils demeurent sans nourriture, sans toit, sans secours, dans le froid et sous la pluie. La synagogue, l’oratoire et la bibliothèque, qui possédait des manuscrits centenaires, sont saccagés ; les rouleaux de la Torah sont détruits par le feu.
• Le général Moinier, qui commande à Casablanca, réussit à amener rapidement 10 000 hommes en renfort à Fès.
• Le gouvernement français rappelle au Maroc le général Louis Lyautey qui arrive à Casablanca le 13 mai 1912.
12 mai 1912 : au Maroc, avènement du Sultan Moulay-Youssef, qui dépose son frère Moulay Abd el Hafid avec égards protocolaires et financiers, grâce à l’appui de la France.
Du 23 mai au 1er juillet 1912 : au Maroc, le général Louis Lyautey arrive à Fès qui subit l’assaut des Berbères ; la situation est sérieuse. Les tribus ceinturent la cité, des émeutiers en tiennent le tiers.
• Le 28 mai, un bataillon de la Légion installé sur les hauts, complètement encerclé, doit former le carré et retraiter pour se dégager.
• Une concentration d’artillerie et une contre-attaque bien menée par le colonel Gouraud renversent la situation. Le colonel Henri Eugène Gouraud est le grand vainqueur des combats de Fès : il dégage la ville en livrant le combat de Hadjerat-el-Kahla. Le 2e Etranger participe à la bataille des Ouled-Soltane.
1912 : le résident général commandant supérieur dispose de bons soldats commandants par des chefs qui se nomment général Louis Gouraud, général Charles Mangin, colonel Louis Pein, lieutenant-colonel Tahon. Il dispose de la Légion.
• Il écrira : ‘’La légion a été durant tout mon commandement oranais et marocain ma troupe, ma plus chère troupe…’’ avant de parapher d’une plume maniée comme une épée.
• Effectivement les légionnaires sont là, en nombre, dans ce Maroc ‘’héroïque’’ et agité de 1912-191. Qu’ils proviennent du 1er ou du 2e Etranger, ils sont à Fez, à Oujda, à Guercif… et le plus souvent dans le bled et le djebel qu’au bivouac.
• Le 1er bataillon du 1er Etranger, présent au Maroc depuis 1907, constitue avec les 2e et 6e bataillons et deux compagnies montées, le 1er Régiment de marche du 1er Etranger.
• Jusqu’en 1914, il va parcourir le Maroc rétablissant l’ordre.
• A la veille de la déclaration de guerre, l’empire chérifien est calme et le drapeau du 1er Etranger reçoit l’inscription ‘’Maroc-1907-1913’’.
Jean BALAZUC P.P.P.P.
09.12.2021


Sources principales.
L’Algérie, l’œuvre française de Pierre Goinard – chez Robert Laffont 1984.
La Légion Etrangère 150e anniversaire – Historia N° spécial 2e trimestre 1981.
La Légion Grandeur et Servitude – Historama N° spécial XI-1967.
Mémoire et vérité des combattants d’A.F.N. – Cercle pour la défense des A.C. d’A.F.N. – Livre blanc 2000.
De la colonisation à l’immigration – La Nouvelle Revue de l’Histoire – Janvier-Février 2006.
Pieds Noirs d’hier et d’aujourd’hui.
France Horizon de l’ANFANOMA.
L’Ancre d’Or, la revue des Troupes de Marine.
La Coloniale – Historama N° spécial N° 18 – 1990.
Le 1er Etranger – Philippe Cary-Tanneur et Tibor Szecsko – Branding Iron Production - 1986.
Histoire de la Légion de 1831 à nos jours - Capitaine Pierre Montagnon – Pygmalion – 1999.
Site du Mémorial de Puyloubier

 

 

Al-Hiba Ahmed (1876 - 1919),

Chef de file de la résistance armée contre la puissance coloniale française dans le Sahara occidental et le sud Marocain, prétendant au sultanat du Maroc. En 1912, la France impose le traité de Fès sur les Marocains et prit un contrôle virtuel sur le pays. Ma al-'Aynayn le fils, c'est-à-dire al-Hiba, a alors décidé que cela a de facto fait perdre son trône au sultan du Maroc, et s'est proclamé Amir Al Moujahidin puis sultan à Tiznit, comme son père l'avait fait avant lui. Un soulèvement dans le sud du Maroc a vu al-Hiba reconnu en tant que sultan de Tiznit, l'Anti-Atlas occidental. Il a gagné un allié puissant dans Si Madani, chef de la famille Glaoui qui ont ensuite été à la faveur du véritable sultan. Avec son armée partisane composée de nomades (Tekna, Ouled Dlim, Regueybat) et berbères du Souss et de l'Anti-Atlas, il entra à Marrakech le 14 août 1912 et s'y fit proclamer sultan. Une bataille décisive contre les Français a eu lieu à Sidi Bou Othmane, près de Marrakech, le 6 septembre 1912. Les forces d'al-Hiba ont été vaincues par les Français commandés par Charles Mangin, avec la perte de quelque 2 000 guerriers tribaux. En janvier 1913, la famille Glaoui, maintenant alliée aux Français, a conduit al-Hiba à Sous. Al-Hiba n'a pas abandonné la lutte et a continué à harceler les Français dans son propre domaine, en 1917 réfugié chez les Ida Ou Baakil il échappa au bombardement aérien à Kerdous (Anti-Atlas), et meurt de causes naturelles le 23 juin 1919 au même lieu. Son frère Merebbi Rebbu lui succède.

 

Bisgambiglia,

Officier de la Légion Etrangère ; blessé lors des combats au Maroc ; décédé le 09.04.1912 en Corse.

 

 

Bavouzet Henri, né le 13.02.1855 à Paris ; saint-cyrien de la promotion 1874-1876 ; il fait carrière dans l’Infanterie ; chef de bataillon le 21.09.1858, il est affecté au 3e R.T.A. le 29.10.1898 ; colonel, affecté au 49e R.I. le 09.11.1910, il permute et arrive au 1er Etranger le 24.12.1910 ; chef de corps du 1er Régiment étranger de 1910 à 1913. Il fait campagne en Algérie et au Maroc de 1898 à 1913. Commandeur de la Légion d’honneur, plusieurs fois cité au combat. Gouverneur de la place de Lorient en 1914 ; général, chef d’état-major du 19e C.A. jusqu’au 01.11.1917. Décédé le 04.01.1942.

Brulard Jean-Marie, né le 01.03.1856 à Besançon ; saint-cyrien de la promotion 1877-1879 ; il participe aux campagnes de Tunisie, Tonkin, Algérie, Madagascar, Maroc et Dardanelles ; capitaine, commandant la 4e compagnie du 1er Régiment étranger à Madagascar en 1896 ; lieutenant-colonel affecté au 4e R.T.A. ; colonel, chef de corps du 1er Régiment de marche du 2e Etranger, au Maroc en 1907. Chef de corps du 2e Etranger de 1908 à 1911. Général de brigade en 1912, chargé de réorganiser l’armée chérifienne ; nommé commandant de la 2e D.I. le 19.09.1914 ; général de division le 25.10.1914 ; il participe brillamment à l’expédition des Dardanelles ; ses croix de guerre portent six palmes ; Grand Croix de la Légion d’Honneur le 09.01.1918; décédé le 19.11.1923 à Nanterre.

Doreau, capitaine du 1er Etranger ; tué au combat de Nekhila le 10.04.1912.

Esperaber, officier de la Légion Etrangère ; tué le 05.04.1912 à Ouldjet-Soltane, au Maroc.

 

Girardot Emile Gustave,

Né le 31.07.1855 à Dunkerque dans le Nord ; saint-cyrien de la promotion 1873-1875. Affecté à la Légion Etrangère au 1er R.E.I. en Algérie puis en Indochine, il participe aux opérations du Haut Mékong et en Annam. Il passe ensuite au 2e R.E.I. au Tonkin le 20.01.1896. Chef de bataillon le 29.11.1896. Rapatrié en février 1897 il rejoint le 2e R.E.I. en Algérie le 26.12.1897 ; désigné pour un second séjour en Indochine, il rejoint un bataillon du 2e R.E.I. le 08.10.1899. Il sert ensuite au 40e R.I. Colonel le 23.03.1907, il revient à l’état-major des troupes à Alger puis il est nommé chef de corps du 1er Régiment étranger, il reçoit son drapeau le 26.10.1907. Parallèlement, il commande p.i. la 3e Brigade d’Infanterie. Il quitte la Légion en 1910 pour commander le 49e R.I. Le 23.03.1911, il est nommé général, commandant de la 3e Brigade. Adjoint au général commandant le corps d’occupation au Maroc en 1912, il commande à nouveau des légionnaires en particulier pendant les opérations sur la Moulaya. Général de division le 14.07.1913, il commande les troupes du Maroc oriental. Le 4 février 1914, en opération devant Oujda, le général décède d’une congestion pulmonaire. La Légion lui doit d’avoir vu disparaître des règlements anachroniques qui faisaient du légionnaire un déshérité et un paria au point de vue des nombreux avantages concédés aux autres troupes.

 

Gouraud Henri Eugène,

Né en 1867 ; officier de chasseurs, il capture Samory au Soudan en 1898 ; colonel, Commissaire du Gouvernement en Mauritanie en 1909 ; conquérant de l’Adrar mauritanien ; colonel puis général, grand vainqueur des combats de Fez en mai & juin 1912 ; il se distingue au Maroc en 1911-1914 sous les ordres du général Louis Lyautey, notamment lors de l’assaut du camp du Roghi en 1914 ; commandant des forces françaises aux Dardanelles en 1915 ; blessé, il est amputé du bras droit ; il est nommé Résident Général au Maroc en 1917 pendant l’absence du général Louis Lyautey ; Haut-Commissaire de la République française et commandant en chef de l’armée du Levant en 1919-1920 ; commandant la 3e division de marche vers M’jara et Fès-el-Bali en 1925. Nommé haut-commissaire en Syrie de 1919 à 1923, il réprime les révoltes de Damas et de Cilicie. Gouverneur militaire de Paris en 1923. Décédé en 1946.

 

Lyautey Louis Hubert,

Né à Nancy le 17.11.1854 ; major de sa promotion de Saint-Cyr Archiduc Albert 1873-1875 ; en Indochine en 1894 ; collaborateur du Maréchal Joseph Galliéni au Tonkin en 1894-1897 et à Madagascar en 1897-1902 ; nommé en 1903 commandant de la subdivision d’Aïn-Sefra ; commandant de la division d’Oran en mars 1907 ; il occupe Oujda en mars 1907 ; il crée le protectorat français au Maroc dont il est le premier Résident Général du 23.04.1912 à 1916 ; par son ascendant et ses relations personnelles, il obtient des forces militaires et pacifie le pays sans même s’en servir ; il respecte les coutumes et la religion du Maroc ; ce royaliste sans roi se crée un royaume au Maroc et l’offre à la République ; ministre de la Guerre en 1916-1917 ; élevé à la dignité de Maréchal de France en 1921 ; il intervient de nouveau au Maroc pour la guerre du Rif de 1921 à 1925 ; il entre à l’Académie Française (livres : ‘’Le rôle social de l’officier’’ et ‘’Lettres du Tonkin et de Madagascar’’) ; président d’honneur de l’exposition coloniale de 1931 à Vincennes ; mort le 27.07.1934 à Thorey.

 

Mangin Charles, né le 06.07.1866 à Sarrebourg, alors dans la Meurthe ; saint-cyrien ; il sert au Soudan de 1890 à 1894 ; il commande de 1895 à 1898 l’escorte de la mission Marchand ; puis il est affecté au Tonkin de 1901 à 1904 ; il est chef d’état-major des troupes françaises en Afrique Occidentale de 1907 à 1911, colonel puis général ; il sert au Maroc sous les ordres du général Louis Lyautey en 1912-1914 ; la riposte de sa colonne sur Ahmed El-Hiba, qui se proclame Sultan du Maroc à Marrakech en 1912, est foudroyante. Après 6 heures de combats, sa colonne bat la harka d’El-Hiba, forte de 10 000 hommes. Le 09.09.1912, il fait son entrée officielle à Marrakech, accueilli par El-Hadj Thami el-Glaoui. Après avoir contribué à la contre-offensive victorieuse de juillet 1918, il commande l’armée du Rhin ; inspecteur général des troupes coloniales ; décédé en mai 1925 à Paris.

Moinier, général ; il sert au Maroc sous les ordres du général Louis Lyautey en 1911-1912 ; commandant la colonne de secours partie de Casablanca vers Fez en 1911, il délivre le Sultan Moulay Hafid, assiégé dans sa capitale par des dissidents.

Moulay Abdelaziz, né le 24.02.1878 à Fès ; Sultan du Maroc en 1894 ; il perd peu à peu la maîtrise de son royaume ; dès 1906, installé à Rabat, il est complètement rejeté ; suite à des massacres de Français en mars 1907, l’Armée Française débarque au Maroc ; renversé par son frère Moulay Abdel Hafid le 04.01.1908, il se retire à Tanger ; décédé le 10.06.1943.

Moulay Abdel Hafid, né le 24.02.1875 à Fès ; frère d’Abdelaziz ; dès 1906, installé à Marrakech, il se pose en prétendant, les armes à la main ; il renverse son frère en janvier 1908 ; Sultan du Maroc du 05.01.1908 au 12.08.1912 ; assiégé dans Fès, il appelle les Français à son secours ; il accepte le protectorat français par la Convention de Fès du 30.03.1912 ; il abdique le 12.08.1912 ; il s’exile en France ; décédé le 04.04.1937 à Enghien-les-Bains.

 

Moulay Youssef,

Né en 1881 à Meknès ; demi-frère d’Abdel Hafid, il lui succède le 13.08.1912, proclamé Sultan à Fès ; Sultan du Maroc de 1912 à 1927 ; il participe au financement de la Grande Mosquée de Paris, inaugurée en 1926. Décédé en 1927 à Fès.

 

Pein Louis Auguste Théodore, né le 30.06.1867 ; saint-cyrien de la promotion Tombouctou 1887-1889 ; capitaine ; chef de l’escorte de la mission scientifique géologique du professeur Flamand de l’Ecole supérieure des Sciences d’Alger ; le 29.12.1899, il hisse les trois couleurs sur la Kasbah d’In-Salah, après avoir repoussé une attaque des Ksouriens ; chef du cercle militaire de Berguent, il inflige de lourdes pertes le 27.01.1906 à un rezzou de Chaambas ; au Maroc en 1912 ; chef de corps du 2e Régiment de Marche du 1er Etranger en 1914-1915 ; commandant la 1ère brigade de la division marocaine en 1915 ; il dirige l’assaut de son ancien régiment sur les ‘’Ouvrages Blancs’’ le 9 mai 1915 ; décédé des suites de sa blessure le 10 mai 1915 à Arcq dans le Pas de Calais.

Tahon, lieutenant-colonel, au Maroc en 1912 ; chef de corps du 1er Régiment de Marche du 1er Etranger au Maroc en 1913-1914 ; colonel, chef de corps du 142e R.I. à Verdun en 1915-1916.