Bergerie où s'est déroulée la tragédie.

Lors d’une de nos réunions qui regroupaient annuellement les anciens directeurs de l’IILE pour une journée et leur permettre de retrouver leurs Amis les pensionnaires ainsi qu'à apporter leur soutien fidèle et incorruptible au Directeur en titre; mon Ancien, François Provost m’avait remis un article sur le passage des légionnaires au Domaine Danjou après l’affaire des bergers Corses.

Je ne me souvenais plus posséder ce papier que j'ai gardé plusieurs années. Le mardi 1er septembre, par hasard je le retrouve, j’apprends en même temps que son auteur, le chef de bataillon François Provost, venait de décéder… la coïncidence m’interpelle…

Aux moments où nous nous apprêtons à rendre un dernier hommage à un autre ancien directeur de l'IILE, le lieutenant-colonel (er) Maurice Clerc:

Je partage :

1976, un jeune légionnaire en faction au dépôt de munitions de PK7, déserte en emportant arme et munitions…

Lors de sa cavale, il s’abrite dans une bergerie près du village de Bustanicu, s’y restaure et s’allonge sur le lit de berger.

Inquiet, se sachant poursuivi, par « précaution », il engage une balle dans la chambre du fusil et  accroche la baïonnette au canon.

Le 24 septembre, alors que la nuit commence à tomber, deux bergers corses, armés de fusils de chasse, s’encadrent dans la porte. Réveillé en sursaut, le légionnaire fonce vers la sortie, tire, tuant net l’un des bergers et perfore l’artère fémorale de l’autre avec sa baiïonette.

Quelques temps après les gendarmes arrêtent le déserteur.

Réactions :

Devant la colère des Corses, suite à ce double meurtre, le président de la République, Valérie Giscard d’Estaing prend la décision de transférer sous 48 heures les compagnies d’EV de la garnison de Corte sur le continent.

Ainsi, la Légion, doit trouver en grande hâte des lieux d’hébergements immédiats, Puyloubier est sollicité et reçoit la compagnie du captaine Le Guen, l’autre compagnie, celle du capitaine Bernier était accueillie au 1er REC à Orange.

Actions :

Je passe à la Mairie de Puyloubier pour informer le maire, monsieur Rigaud de cette arrivée imminente des légionnaires. les journaux ayant largement diffusé et commenté la fin tragique des bergers corses. Il me fait part, dès mon arrivée de l’inquiétude de ses administrés.

Constat :

Le transfert de la compagnie « Le Guen » (Effectif :340) sur le continent par avions « transall » au départ de Solenzara, poser à Hyères et transport par camions à Puyloubier n’a duré que 48 heures.

La compagnie arriva à Puyloubier dans la nuit, accompagnée d'un grand vent et d'une pluie battante. Quelques camions resteront « plantés » dans la luzerne (où se trouve actuellement la vigne devant la « Popote »).

Cadres et EV sont alors dirigés vers le restaurant où des Anciens les accueillent tandis que leur est servi un casse-croûte musclé et du café.

La veille, une reconnaissance avait défini les lieux et les hébergements possibles…

Organisation:

Le chef de bataillon Estay qui commandait le GILE était basé à Aubagne et visitait les compagnies à Orange et à Puyloubier.

Le lieutenant-colonel Mougins, commandant le 2ème RE basé à Bonifacio vint ne fois voir la compagnie « Le Guen » à l’IILE.

Le GILE passa au 1er RE le 12 décembre 1976, lorsqu’il fit mouvement sur Castelnaudary.

Particularité :

Nous recevions, les officiers tous les dimanches soir à dîner à la maison, ainsi, ils bénéficiaient de la télé. Nous n’eûmes qu’à nous louer de cette disposition qui mettait de l’ambiance et relevait le moral. En effet, quid de leur futur garnison ? Quid de leurs familles restées à Corte. Seraient-elles logées où le GILE serait implanté ? Etudes des enfants ? Attitudes des Corses vis-à-vis d’elles ?

Pour l’instruction et l’entraînement, cette compagnie ne manquait pas d’espaces et la montagne Sainte-Victoire était un excellent terrain de crapahut.

Pour les séances de tir, elle disposait du champ de tir du Bimont au pied de la Sainte-Victoire.

Par contre s’est posé le problème de la distraction des EV et en décembre, il était temps qu’ils changent d’horizon…

Conclusion :

La cohabitation avec les Anciens fut excellente. Ceux-ci les invitaient souvent dans leur chambre le soir. D’où l’angoisse légitime, quelques temps avant l’appel du soir de constater les hangars ou les tentes vides.

Personnellement j’ai beaucoup apprécié, malgré les contraintes, ce passage de la compagnie « Le Guen ». Elle réveilla nos Anciens et resta un point fort de mon temps de Directeur de l'Institution.

François Provost, décédé le 31 août 2020.