L’excellent Philippe Bilger dans son non moins excellent blog a publié un billet « Vive les profs », prenant la défense de ceux-ci. Ce billet m’a interpelé !

Toutes les études un peu sérieuses le montrent: la qualité de l’enseignement et des apprentissages est ce qu’il est et nul besoin de rappeler le nombre de jeunes quittant chaque année le cycle scolaire obligatoire, quasi analphabètes ou, en tout cas, ne sachant pas s’exprimer correctement en français, et ne comprenant pas la teneur d’un texte lorsqu’ils ont, une fois n’est pas coutume, réussi à le lire. Mais un autre aspect de la vie scolaire me semble très préoccupant: l’indiscipline devenue proverbiale dans les établissements scolaires de tous les niveaux. Le délitement de la société est tel que le contraire m’aurait surpris. 80% des professeurs reconnaissent l’aggravation, chaque jour qui passe, du problème, divisant les responsabilités presque à parts égales par les parents, les politiques gouvernementales et les élèves. Ailleurs où la situation est semblable, seuls 3% de personnes interrogées, attribuent la faute de ce triste phénomène au corps enseignant.

Le thème est complexe et mérite une analyse qui ne peut se contenter de superficialité, c’est pourquoi je limiterai mon propos à la simple exposition de mon opinion.

La responsabilité des parents est patente et on peut comprendre que les difficultés augmentent à la mesure de la raréfaction de l’argent pour les dépenses familiales de base. Les désillusions et l’amertume concernant un improbable avenir ne contribuent pas plus à l’établissement d’une ambiance salutaire. Mais la vérité est que, l’indifférence des parents, la faillite des principes – la cupidité de la consommation immédiate et le mépris des valeurs fondamentales viennent de loin déjà. C’est un long parcours de démission.

Si les politiques gouvernementales ont été et sont erronées, les coupes budgétaires, la réduction du personnel et l’éternelle guerre avec les syndicats n’ont rien généré d’autre qu’une plus grande insatisfaction et de la révolte. La tempête sociale a des coûts exorbitants.

Dans le fond, montrer les élèves du doigt pour leur indiscipline c’est presque comme attribuer aux pauvres la faute de leur misère. Les enfants et les jeunes en général sont beaucoup ce qu’on leur permet d’être – c’est l’éternelle question de l’époque qu’il faut vitupérer (comme Léo Ferré dans « Les fourreurs »), et des circonstances qui sont dramatiques dans bien des cas. On ne vit pas dans le meilleur des mondes et l’on exige maintenant ce qui n’existe pas encore.

Mais les élèves sont aussi, et beaucoup, de ce qu’ils voient faire leurs aînés. Aujourd’hui, c’est la télévision - ce maître que tous ont à la maison – chaque fois moins un véhicule de formation et chaque fois plus une fenêtre ouverte sur la futilité et la violence. Que pouvons-nous espérer de jeunes déracinés, sans horizon et qui ont dans la boîte magique le seul divertissement ? A travers elle ils réussissent à accompagner le déplorable comportement et le vil baratin de quelques professeurs, quand ils se manifestent. Et avec de tels exemples il n’y a pas de discipline qui résiste. Je ne parlerai pas des méfaits de l’internet ni de ceux du téléphone portable, objets de tous les excès !

AM