Chers Présidents,
chers anciens,
chers compagnons,
chères familles et chers amis,
En chemin d’en prendre l’habitude annuelle, nous voici rassemblés ici, par ce bel après-midi, dans ce petit cimetière de GAN, près de PAU, pour évoquer la mémoire du Capitaine Antoine YSQUIERDO et celle du Lieutenant-colonel Georges MASSELOT, deux hautes et nobles figures du Panthéon militaire de notre chère Légion étrangère, et pour leur rendre hommage.
A cet égard, il m’a paru pertinent de conserver les termes avec lesquels nous avions voulu, l’an dernier, rappeler leurs riches personnalités respectives et nous remémorer leurs prestigieux états de service. Les voici donc :
Le Capitaine Antoine YSQUIERDO a vu le jour le 14 juillet 1924 en Espagne.
En juillet 1942, à peine âgé de 18 ans, il s’engage dans les rangs de la Légion étrangère française et participe, six mois plus tard au sein du 1er Régiment étranger d’infanterie, à la phase finale de la réduction des forces de l’Axe en Tunisie.
Après ces batailles, il rejoint le Régiment de marche de la Légion étrangère avec lequel il participe aux campagnes de France et d’Allemagne, comme caporal, puis comme sergent. Il y gagne sa première citation.
La guerre en Europe terminée, il rejoint le Maroc avec son régiment, et embarque dans la foulée pour l’Indochine avec celui-ci devenu 3ème Régiment étranger d’infanterie.
Il y est à nouveau cité, puis, rapatrié pour fin de séjour, il est admis au concours de l’Ecole Spéciale Militaire. Il est nommé Sous-lieutenant à titre étranger en 1948.
Il effectue un deuxième séjour en Extrême-Orient, où, avec la 8ème compagnie du 3ème REI, il tente notamment de recueillir ses camarades pris au piège de l’évacuation de la RC4. Rapatrié en Algérie, il est affecté à l’instruction des jeunes légionnaires à Mascara et, en 1953, il se porte volontaire pour un troisième séjour en Indochine.
Là-bas, il se fait breveter parachutiste pour « aider les copains », à Dien-Bien-Phu. C’est ainsi que, dans la nuit du 9 au 10 avril 1954, en pleine bataille, il saute sur la cuvette avec le 2ème Bataillon étranger de parachutistes.
Nous nous souvenons qu’il y a quelques semaines, le 10 avril 2025 précisément, nous avons rendu hommage et justice au Caporal Lucien Calonge y Vilar, lui aussi d’origine espagnole, lui aussi ayant sauté cette même nuit, avec le 2ème BEP, peut-être dans la même vague d’assaut, mort pour la France le 30 avril suivant, et qui avait été oublié sur le Monument aux Morts de Mont-de-Marsan, sa ville natale.
Plusieurs fois blessé pendant les combats, Antoine Ysquierdo est fait Chevalier de la Légion d’honneur sur le champ de bataille. Fait prisonnier par le Viet-Minh le 7 mai 1954, il effectue la « longue marche » et passe de longs mois de captivité dans le tristement célèbre camp n°1.
Libéré en septembre 1954, il demande son affectation au 1er Bataillon étranger de parachutistes, que l’on reforme après son deuxième anéantissement, et rentre avec celui-ci sur l’Algérie.
Avec le 1er BEP, devenu 1er Régiment étranger de parachutistes, il sera de tous les combats jusqu’en 1961. Comme commandant de compagnie d’abord, où il aura pour adjoint le Capitaine Joseph ESTOUP, fidèle parmi les fidèles et présent ici parmi nous, puis comme officier de renseignement du Régiment. C’est ainsi qu’il participe notamment à l’expédition de Suez, à la bataille d’Alger, à celle des frontières pendant laquelle il relèvera la dépouille sans vie de son Chef de corps, le Lieutenant-colonel JEANPIERRE, abattu il y a eu 67 ans avant hier, alors qu’il conduisait au plus près l’action de ses compagnies, puis aux combats victorieux du « Plan Challe ».
Suite à son engagement, avec tout son prestigieux régiment, et d’autres nous le verrons, dans l’affaire du « putsch d’Alger » en avril 1961, il est condamné à la prison et rayé des cadres de l’armée d’active. Il abandonne l’uniforme le 6 août 1961.
Il est alors titulaire de 14 citations, dont 5 à l’ordre de l’armée.
Longtemps après, le 30 avril 1993, il accompagnera le Général HALLO, son ancien chef de section du RMLE de 1944, porteur de la main du Capitaine DANJOU.
Commandeur de la Légion d’honneur, le Capitaine Antoine YSQUIERDO s’éteint le 7 juin 2001, il y aura 24 ans dans quelques jours.
Georges MASSELOT, natif de Bougie en Algérie, jeune « Pied-Noir » de dix-neuf ans, intègre Saint-Cyr en 1930. Il a déjà le fort caractère qui va s’exprimer tout au long de sa carrière. Il sera en première ligne partout où l’honneur de la France et de son Armée sera en jeu, et, à chaque fois, il en paiera le prix fort dans son corps de soldat, dans son cœur de père, avec la mort de son fils en opération, et dans son âme de Français, avec ses années dans les geôles de sa Patrie.
Il rejoint la Légion étrangère en 1936, puis, de 1939 à 1961, sans interruption, il sera au combat. Il est très grièvement blessé en janvier 1940 dans les rangs du 12e Régiment étranger d’infanterie.
Après sa convalescence, il est affecté à l’Armée d’Afrique, au Régiment de marche de la Légion étrangère dans les rangs duquel il sera à nouveau blessé en mai 1943, en Tunisie. Après une année d’hospitalisation, il retrouve le RMLE en mai 1944 et s’y illustre au cours des durs combats de la libération des Vosges. Le Capitaine MASSELOT est alors fait chevalier de la Légion d’Honneur, à titre exceptionnel, et décoré sur le front des troupes, en Allemagne, le 7 avril 1945.
La guerre terminée, le RMLE, devenu 3e REI, ne rentre au Maroc que pour repartir en 1946 en Indochine. Georges MASSELOT va donner toute sa mesure de chef et de soldat au cours de ce conflit. Breveté parachutiste en Algérie, en 1949, il va tout naturellement participer à la mise sur pied des Parachutistes de la Légion étrangère et prendra la tête du 3e BEP à l’été 1949. Désigné pour commander le 1er BEP en 1950, le premier anéantissement du bataillon à Coc-Xa annule cette mutation. Il rejoint alors le 5e REI pour son deuxième séjour en Indochine. Il s’illustre avec son bataillon dans la protection du repli d’Hoa-Binh, en février 1952, et, toujours à titre exceptionnel, est fait Officier de la Légion d’Honneur. En juillet 1953, il rentre en Afrique du Nord. Commandant en second le 3ème BEP, on lui propose à nouveau de commander le 1er BEP. Mais ce dernier est engagé peu après dans la bataille de Diên-Biên-Phu ce qui, de ce fait, prolonge le commandement de son chef de corps, le commandant Guiraud. En février 1954, le 3e BEP est désigné pour sauter sur Dien Bien Phu et le Chef de bataillon MASSELOT est choisi pour le commander. En raison de problèmes d’effectifs, le Bataillon n’embarquera pour l’Indochine qu’à la fin avril et n’y arrivera qu’après la chute du camp retranché. Le 3e BEP fusionne alors avec le reliquat du 2e BEP et en reprend le numéro, le fanion et les traditions. Le 13 juillet 1955, ce fanion reçoit la fourragère de la Légion d’Honneur.
Le 18 novembre 1955, le 2e BEP rentre en Algérie et devient 2e REP. Le Chef de bataillon MASSELOT en devient le commandant en second.
En juin suivant, il est muté hors légion comme adjoint opérationnel du commandant du secteur de Djelfa. Il va s’y distinguer en éliminant Amirouche, le chef de la Willaya 3, et Si-Haouès, celui de la Willaya 6.
Le 7 juillet 1956, toujours à titre exceptionnel, le Commandant MASSELOT est fait commandeur de la Légion d’Honneur. Le 1er octobre, il est nommé Lieutenant-colonel et, pressenti pour commander le 1er REP après la mort au combat du Colonel JEANPIERRE, en 1958, il prend finalement la tête du 18ème RCP, un régiment d’appelés. En quelques mois, il va en faire l’une des meilleures unités de la 25ème Division parachutiste qui gagnera le surnom de « 3ème REP » ! Les opérations et les succès s’enchaînent. Hélas, son fils Philippe, âgé de dix-huit ans, est tué en juin 1960 au cours de l’une d’entre elles. Cette terrible épreuve l’affecte profondément, même s’il n’y paraît pas.
En avril 1961, il engage son régiment dans le « Putsch d’Alger ». Après son échec, à l’image de tous ses camarades Chefs de corps, il prendra sur lui toutes les responsabilités de son acte.
Transféré en Métropole, il est incarcéré à la prison de la Santé et sera condamné à huit ans de détention criminelle.
Il est alors Commandeur de la Légion d’honneur et titulaire de 15 citations dont 10 à l’ordre de l’armée.
Le 13 juillet 1965, après cinquante et un mois de détention, il bénéficie d’une grâce amnistiante, et, en 1984, il est réintégré dans son grade, avec ses décorations.
Le Lieutenant-colonel Georges MASSELOT, magnifique soldat au caractère et à l’humour affirmés, meurt le 1er juin 2002 à Pau, il y aura 23 ans demain.
Le Capitaine Antoine YSQUIERDO et le Lieutenant-colonel Georges MASSELOT ont, l’un comme l’autre, participé dans les rangs de la Légion étrangère, aux combats de la Deuxième guerre mondiale et ont contribué, il y a 80 ans, à la libération de la France. L’un comme l’autre, ils ont été engagés, comme officiers de Légion, en Indochine et en Afrique du Nord ; l’un comme l’autre, ils s’y sont battus, honnêtes et fidèles ; l’un comme l’autre, ils ont été vainqueurs militairement sur le terrain algérien ; l’un comme l’autre, en avril 1961, ils ont choisi d’obéir à leur conscience de soldat et d’honorer la parole qu’ils avaient donnée ; l’un comme l’autre, ils ont affronté leurs juges, sans regrets ; l’un comme l’autre ils ont tout perdu, sauf leur honneur ; aujourd’hui, l’un comme l’autre, ils reposent ici, à quelques pas d’écart, dans cette terre béarnaise qu’ils avaient choisie.
Au nom du Général Jean MAURIN, Président de la Fédération des Sociétés d’anciens de la Légion étrangère, je tiens d’abord à exprimer ici notre fierté de compter le Capitaine Antoine YSQUIERDO et le Lieutenant-colonel Georges MASSELOT parmi nos grands anciens.
Je veux dire ensuite à leurs proches et amis ici rassemblés, à Jacqueline en particulier, fille du Capitaine Ysquierdo et à sa famille, combien la vie exemplaire que leurs parents ont consacrée à leur patrie, d’origine ou d’adoption, a inspiré et continue d’inspirer, au quotidien, les jeunes générations qui servent aujourd’hui à la Légion étrangère.
Je souhaite, enfin, dire à ces proches et amis l’indéfectible estime que nous leur portons, et leur assurer que nous ne les oublions pas. Notre présence ici aujourd’hui en constitue le témoignage.
Général (2S) Henry CLEMENT-BOLLEE
Vice-Président et Délégué régional de la FSALE pour le Sud-ouest
Hier, samedi 31 mai 2025, un fort détachement de la Délégation Sud-ouest de la FSALE s’est rendu dans le petit cimetière de Gan, près de Pau, pour rendre hommage au Lieutenant-Colonel Georges Masselot et au Capitaine Antoine Ysquierdo, deux hautes et nobles figures de notre Panthéon légionnaire, qui y reposent à quelques pas d’écart.
Etaient présentes, des délégations de l’AALE 64, organisatrice, de l’AALE 65 et de l’AALE 47, avec leurs présidents respectifs et leurs drapeaux. L’AALE 33 était représentée par le Capitaine (H) Joseph Estoup, notre infatigable ancien, fidèle parmi les fidèles, et l’Adjudant (ER) Dominique Karine, Délégué de l’AALP pour le Sud-ouest. Quelques drapeaux d’amicales locales d’anciens combattants s’étaient également joints à nous.
La famille du Capitaine Ysquierdo était présente en la personne de Jacqueline, sa fille, et de Marie-Fleur, sa petite fille.
Quelques épouses nous ont également fait l’amitié d’accompagner leurs maris.
La cérémonie, sobre et émouvante, a commencé à l’entrée du cimetière, où j’ai prononcé l’éloge de nos deux grands Anciens. Puis nous nous sommes dirigés, derrière les drapeaux, vers la sépulture du Capitaine Ysquierdo. Une gerbe fut déposée par le Capitaine Joseph Estoup, son ancien adjoint à la 2ème compagnie du 1er Régiment étranger de parachutistes, et par Jacqueline sa fille. Une minute de silence et de recueillement fut suivie du chant du 1er REP interprété par tous les participants.
Le même cérémonial s’est répété sur la tombe du Lieutenant-Colonel Masselot. La gerbe y fut déposée par le Lieutenant-Colonel (ER) Henri Chaudron, Président de l’AALE 64, et par l’Adjudant (ER) Dominique Karine, Délégué de l’AALP pour le Sud-ouest. Puis nous avons entonné le chant du 2ème Régiment étranger de parachutistes.
A l’issue de la cérémonie, le détachement s’est retrouvé au « bistrot de l’Ossau » pour quelques rafraichissements fort bienvenus.
Merci au jeune Président de l’AALE 64, le Lieutenant-Colonel (ER) Henri Chaudron, pour l’organisation de ce rassemblement, dans laquelle se sont considérablement investies la secrétaire de cette amicale, la toujours efficace Ysabèle Varésano, et Jacqueline Ysquierdo.
Vous trouverez, ci-joint, l’éloge que j’ai prononcé sur place en votre nom à tous, à cette occasion, et quelques photos qui rendent compte de l'événement.
Prochain bond, le Congrès de la FSALE à Castelnaudary dans quinze jours !
Croyez en ma bien fidèle amitié,
Général (2S) Henry Clément-Bollée,
Vice-président et Délégué régional de la FSALE pour le Sud-ouest
PS. Merci une nouvelle fois aux photographes !