Saga de l’été : Constat !
La légion a été présente en Indochine sans discontinuité de 1883 à 1954. Sous le commandement du colonel de Cadoudal, puis du colonel Alessandri, le 5ème R.E.I., renforcé par 80 légionnaires austro-allemands discrétement expédiés d’Algérie en 1940 pour leur éviter des ennuis, resta au Tonkin de 1939 à 1945. Ses trois bataillons (Gaucher, Cokborne, Lenoir) subirent l’agression japonaise du 9 mars et participèrent à l’harassante retraite vers la Chine de la colonne Alessandri. Mais c’est la guerre d’Indochine qui allait être le chapitre le plus marquant de la Légion, comme le Maroc avait été celui de la « vieille Légion ».

 

 

Ses effectifs triplèrent. Les 2ème, 3ème, 5ème REI, le 1er REC, la 13ème DBLE, et deux unités parachutistes créées en 1948, les 1er et 2ème BEP, soit 20 000 à 30 000 hommes en permanence, représentent le tiers des Européens du corps expéditionnaire engagé en Indochine. Comme toute l’armée française, la Légion aima ce pays et elle en gardera la nostalgie. Mais elle lui paya le plus lourd tribut de son histoire : 10 000 morts en neuf ans, l’équivalent de ce qu’elle avait perdu de 1831 à 1918 au fil des conquêtes coloniales et des guerres européennes.
Un jour de mai 1954, le colonel Gardy, commandant le 1er étranger s’adresse d’une voix sourde à ses hommes rassemblés dans la cour du quartier Viénot à Bel-Abbès : « Dien-Bien-Phu vient d’être prise. Nous sommes réunis pour rendre hommage au sacrifice de ceux qui sont tombés au cours de cette lutte épique. Nous allons présenter les armes aux drapeaux qui ont disparu dans la bataille. » Et il appela comme au rapport : « 2ème et 3ème bataillons de la 13ème DBLE… 2ème et 3ème bataillon du 3ème REI… 1er bataillon du 2ème REI… 1er et 2ème BEP… » Peu à peu, reconstitués, toutes les unités légionnaires vont arriver en Algérie et passer à nouveau par le moule de Bel Abbès pour réapprendre des traditions et des usages parfois oubliés au contact de la guerre révolutionnaire indochinoise. Et très vite, elles sont replongées dans la lutte. Toute la Légion – 20 000 hommes – se battra en même temps sur le territoire algérien : dix régiments et quatre compagnies sahariennes.
Le « Fell » succède au « Viet ». La Légion aura en sept ans d’opérations en Algérie six fois moins de pertes qu’en Indochine, mais, pour de multiples raisons, son cœur restera longtemps en Indochine. Ainsi la Légion n’incorpore que 2 981 candidats en 1955 contre 6 327 en 1953. Mais progressivement, les légionnaires s’attachent, malgrè les longues et souvent vaines quêtes de rebelles dans la boue des pistes, la neige et la caillasse des djebels. L’amertume les saisira quand ils comprendront que leur victoire sera annulée sur le tapis vert. Pourtant, seul le 1er REP, proche d’Alger qu’il a séduite et qui l’a séduit, s’insurgera. A Sidi-Bel-Abbès, le colonel Brothier, commandant la Légion étrangère dira à son prédécesseur le général Gardy, inspecteur de la Légion, passé à la révolte : « La Légion étant, par définition, étrangère, elle n’interviendra pas dans une affaire purement française. »


Apte à toutes les misions :
La Légion à toujours été une troupe jeune et ardente, retrouvant dans son passé la source de ses qualités et notamment cette faculté d’adaptation qui lui permet de venir à bout des difficultés les plus grandes.
En 1981, comment peut-on imaginer le rôle de la Légion étrangère au cours des années à venir ?
De toute évidence, elle demeure prête à remplir des missions et des travaux d’intérêt général. Ses deux régiments de Corse sont, par exemple, sollicités régulièrement pour lutter contre les incendies. Le 61ème BMGLE, stationné au Larzac, apportait son concours aux cultivateurs de la région, en évacuant, à dos d’hommes, les récoltes de maïs menacées par des inondations et en réparant les dommages causés aux routes et aux chemins.
Apte à intervenir en cas d’urgence ou de cataclysme, la Légion étrangère est faite pour participer à des « œuvres magistrales ». C’était son lot au Maroc, en 1928, alors qu’elle construisait la route du Z.I.Z, à travers l’Atlas et le tunnel de Foum Zabel, à l’entrée duquel fut gravée l’inscription fameuse : « la montagne nous barrait la route. Ordre fut donné de passer quand même. La Légion l’exécuta ». A la sortie de l’ouvrage, taillé en plein roc, au pic et à la barre à mine, une autre inscription précisait : « L’énergie de leurs muscles et une farouche volonté furent leurs moyens ».


De tels travaux ne doivent pas faire oublier, que la vocation essentielle de la Légion est opérationnelle. Sa destination militaire est inscrite dans le contrat.
"Le légionnaire" précise le général Foureau, commandant du Groupement de la Légion étrangère, patron de la Légion de 1973 à 1976, "est d’abord un soldat de métier qui peut être employé à tout instant, en tout lieu et sans aucune restriction. Lobligation vaut pour le parachutiste et le pilote d’engin blindé, mais aussi pour l’informaticien, le conducteur d’offset ou l’électro-mécanicien. Elle vaut pour le musicien qui consacre une part de son temps au maintien en condition et n’éprouve aucun sentiment d’infériorité sur le terrain de manœuvre.
On peut penser que le recrutement continuera à permettre une sélection sévère. Il y aura toujours, étant donné le monde, des hommes pris dans les remous politiques de leur époque et contraints de quitter leur pays pour se faire oublier. Il y aura toujours des hommes possédant le métier de soldat dans le sang que ne peuvent retenir de petits bonheurs confortables, d’autres enfin, qui viennent chercher l’oubli de déceptions ou la possibilité d’un rachat. Tous continueront à rechercher un milieu qui les « dépayse », la liberté intérieure par l’acceptation de règles simples et connus de tous et faculté de « payer leurs impôts à un seul guichet
».
La Légion poursuit sa route avec une fierté partagée par le peuple de France.

Ecrits récupérés et corrigés par CM.