D'entrée, je pense être hors sujet, néanmoins cette lettre d'Antoine m'inspire au point de dire, peut-être, n'importe quoi. Rêveries et sonneries, Antoine fait des rêves tortueux et délicats qui accentuent ses fantasmes hors d'âge. Ce jeune homme devrait faire très attention à son coeur, sa tension, à ce rythme, deviendra vite incontrôlable, ménage ta monture (en français dans le texte, expression ici à double sens) ! "Bon sang", voilà que je me mets à dire n'importe quoi à la lecture de sa lettre, un peu spéciale... Tout se mélange, tout s'embrouille, ouf, c'est l'heure du réveil, le jour se lève, la vie reprend son cours, ce n'était qu'un cauchemar ou autre... mais pourquoi un cauchemar ? ça y est, je retourne dans mes embrouilles. Mon cher Antoine, avec un tel programme, même rêvé, tu ne peux que faire des jaloux, pour bon nombre d'entre-nous, ce genre de situation n'est bonne qu'à créer une incompatibilité imposée et représentée par le balancier de l'horloge du temps qui oscille sans cesse entre le vouloir et le pouvoir.
CM


Sonnerie...


Il a un travail à faire, écrire une lettre d’ailleurs. Mais il se réveille tard, quand le dos lui fait mal d’avoir passé tant d’heures couché. Il sort de son lit sans réelle envie d’aller de l’avant, les idées encore brouillées par la soirée d’hier. Il se traîne jusqu’à la douche et la laisse l’arroser dans une sorte d’apathie contemplative. Il s’habille, va manger une biscotte, sans la casser ( ! ), se fait un thé bien fort, allume l’ordinateur et reste là les yeux dans le vague sirotant son thé. Il se lève, se ressert un thé et retourne à l’ordinateur. Son regard accroche le portable laissé sur la table, il se souvient de la femme qu’il a connue la nuit dernière, prend l’appareil pour vérifier qu’il a bien noté le numéro qu’elle lui a donné, en courant, déjà sur le départ. « Appelle-moi un de ses jours » lui a-t-elle dit avec un sourire encourageant. Il réfléchit si, aujourd’hui, ne pourrait pas être « un de ces jours ». Naanaan, c’est trop prématuré, il repose le téléphone, secoue la tête pour chasser la somnolence et se concentre sur son travail. Ces lettres d’ailleurs lui tiennent à cœur et il veut toujours qu’elles soient impeccables, inattaquables. Hélas cela ne se vérifie pas toujours. Il se prépare à commencer, mais est immédiatement distrait, il vide la théière. D’un autre côté, pense-t-il, se serait marrant de la surprendre si j’appelais maintenant.
Elle est assise sur un banc face à la mer. Elle s’est réveillée tard, a sauté du lit avec entrain, a pris une douche rapidement et est sortie de suite pour ne pas perdre la journée. Elle a pris un café dans un bistrot avec une amie, elles ont mis la conversation à jour, se sont séparées et elle est restée en bord de mer assise avec un livre posé sur les genoux, laissant divaguer sa pensée, le regard perdu sur l’horizon, méditant à la soirée précédente, se demandant s’il allait l’appeler ou bien l’avait déjà oubliée. Avant la douche, elle s’était pesée et s’était préoccupée d’un petit kilo en trop. Elle fait des plans pour la semaine à venir : diète, couper les cheveux, acheter des fringues. Elle veut être impeccable, au cas où il l’appellerait un de ces jours, comme elle lui avait dit. La sonnerie de son portable retentit, c’est un numéro inconnu, elle répond et découvre, trop tard, que c’est lui qui demande si elle est libre ce soir. Elle s’emmêle les pinceaux, tente une plaisanterie mais elle a la sensation d’être ridicule, elle veut dire oui, mais fini par dire non, craignant qu’il la trouve un peu trop facile. Ils raccrochent. Le cœur en émoi elle se sent toute retournée, un nœud au ventre, heureuse qu’il ait appelé, triste d’avoir refusé l’invitation, se disant qu’il n’appellera peut-être plus.
Lui est désabusé, il a pensé que ce serait plus facile, mais elle a dit non et maintenant il va falloir se trouver une autre compagnie pour la soirée.
Le jour se termine et l’écriture de la lettre d’ailleurs restera pour demain. Il parcourt la liste de ses contacts sur le portable, sans beaucoup d’illusions. Il hausse les épaules, appelle un ami, met sa veste - le soir il fait encore frisquet – et s’en va diner. On verra après. Quant à elle, peut-être l’appellera-t-il un de ses jours, peut-être non…
La sonnerie du portable… eh non ! C’est le réveil !
AM