Christian dégaine plus vite que son ombre. Bien entendu il y aurait encore tant et tant à écrire sur la BD… Rédacteur en chef à KB j’avais traité le sujet sous le seul angle de La Légion dans la BD, aidé par un professeur en Sorbonne, spécialiste de la chose… La tâche est immense, alors quand, comme Christian, on s’attaque à la BD en général, il faudrait des dizaines d’articles et des années pour en faire vraiment le tour, analysant selon les thèmes, les époques, les auteurs, les éditeurs.

Notre ami s’est contenté de brosser rapidement ce tableau pour nous faire prendre conscience que même si c’est de la littérature avec un L minuscule, ce genre littéraire ne s’épuise pas, a toujours autant, sinon plus d’adeptes prêts à vendre leur âme au diable pour la dernière parution ou une planche de tel ou tel…

Il m’a été promis, il y a bien longtemps, une planche originale  des aventures d’un type avec une drôle d’oreille… peut-être un jour… allez savoir…

Entretemps, comme il le suggère si bien, que chacun crée un petit budget BD et il s’en trouvera enrichi.

Chez moi je conserve préciseusement une collection originale de Tintin, sauf le noir et blanc de « Tintin chez les soviètes » (l’original s’entend…), une deuxième, plus moderne, héritée à Mururoa lors de la dispersion de la bibliothèque des officiers, que je garde tout aussi jalousement, de crainte de ne plus voir de noirs dans les nouvelles éditions de Tintin au Congo par exemple.

Déjà que Lucky Luke a dû changer sa clope pour un brin de paille… AM

 

La boite en carton de Calvin, comme je l’indiquais dans le texte concernant les BD précédent, est un des meilleurs moyens d’explorer le monde, décidément, pour les accros de la BD, les héros serviraient-ils à nous protéger et nous avertir du danger ?

 

Pour avoir été un temps scénariste de BD, toute modestie s’imposant, j’ai une réelle admiration pour monsieur Goscinny un des auteurs légataires de Lucky Luke, Astérix et nombre d’autres toutes particulièrement réussies. Mais une magique imagination est plus particulièrement présente dans les albums de Lucky Luke que dans les autres réalisations.

 

Avec leur cow-boy solitaire, Morris et Goscinny nous font entrer dans le royaume de la BD grand public.  Nos deux auteurs sont parvenus à installer les « aventures » de Luky Luke, dans une place à part, dans un climat d’évasion où, bagarres, poursuites et malentendus n’ont plus la moindre gravité. Le croque-mort rôde partout mais il en est toujours pour ses frais. J’adore l’ambiance amorcée  avec ces panneaux signalétiques à l’entrée des villes, menaçants à souhait (bienvenue à Tortilla Gulch: sa prison, son tribunal, son cimetière) mais toujours, une heureuse maladresse fait que les fusillades, duels et embuscades ne tournent jamais au bain de sang.

Ainsi est inventé le western sans cadavre à l’identique des jeux de notre enfance quand nous jouions aux cow-boys et aux indiens.

Les Dalton  apparaissent plus bêtes que méchants, attachants même, ils n’arrivent jamais à “descendre” Lucky Luke.

 

 

Cette BD magique qui me fait oublier le passé, le présent et le futur, me fascine, c’est exactement la restitution d’une ambiance, celle de la conquête de l’Ouest américain avec ses caravanes, ses indiens, ses détachements de cavalerie, ses parties interminables de Poker avec les incontournables tonneaux de goudron et les sacs de plumes.

La philosophie pénale de cette BD est profondément généreuse et inoffensive. C’est l’envers de la réalité, le héros est un extra-terrestre sans nerfs, ami de tout le monde et qui a pour vocation d’affronter une entreprise sécuritaire, intriguant au plus haut niveau de l’Etat, en la personne d’un directeur d’agence de détectives qui établit des fiches sur la dangerosité de tous, prône la tolérance zéro et postule: “qu’en tout honnête homme sommeille une canaille”, faisant ainsi de la suspicion une priorité !

Sous des dehors anodins et gentillets, le monde de Lucky Luke propose bel et bien une subtile mise en cause de la paranoïa sécuritaire de notre temps. Rien que cela!

Il y a tant à dire sur la BD: “Comment la BD s’est-elle saisie des horreurs de la seconde guerre mondiale ? Comment traite-t-elle une sexualité misérable, une misanthropie galopante et une déprime structurelle ? Comment Gaston Lagaffe, le mangaka japonais ou passant par les aventures d’une Bovary contemporaine, nous font les BD découvrir l’œuvre immense d’un “Hergé” japonais spécialiste de Flaubert…

Ah! Gaston: “objets inanimés avez-vous donc une âme ?” la réponse est: “pas qu’un peu, notre ami”, lui, Lagaffe ne manque jamais d’aimer ses créations…qui le lui rendent bien.

La BD, c’est la lecture idéale de nos vacances, je propose qu’un budget mensuel soit mis en place dans chaque famille, pour l’achat de BD, c’était ce que m’attribuaient mes parents et chaque jeudi j’attendais avec impatience le journal de “Spirou”. Je leur voue une reconnaissance éternelle. Un grand plaisir gratuit m’est offert quand je vois ces enfants aux rayons BD des magasins, assis à même le sol, plongés dans la lecture de leurs bandes dessinées préférées. Le monde qui les entoure n’existe plus ; ils sont, à l’image d’Antoine : ailleurs. Leurs parents devraient avoir la substantielle intelligence d’en tirer la leçon.   Je n’ose pas me mettre à lire à côté de ces gosses, ce serait un réel plaisir, mais le temps est passé, je suis devenu bien trop adulte.  Il ne me reste que la joie réelle de repartir en enfance, peu importe l’endroit où je me trouve.   Mais, bon sang ne saurait mentir, je dois sûrement bien faire mon âge, heureusement, mais peut-être pas mentalement... Ouf !

CM