Préambule :

L'année 1950 est décisive sur le plan militaire et politique pour le CEFEO (Corps Expéditionnaire Français en Extrême Orient), commandé par le général  Carpentier.

Entrainés par les troupes communistes chinoises, les troupes du Vietminh, commandées par le général Giap, deviennent redoutables, et en octobre 1950, elles remportent une 1ère victoire sur la RC 4. (Surnommée depuis 1948, « La route sanglante », en raison des nombreuses embuscades dont sont victimes les troupes françaises dans ce secteur).

Une centaine de postes sont créés sur la RC 4 qui longe la frontière de Chine, de Lang Son à Cao Bang. Les principaux postes étant Dong The et That Khe.

Dès 1949, le chef d’Etat-Major des Armées, le général Revers, était pour l’abandon de ces postes. Le général  Alessandri y était fortement opposé.

Le 2 septembre 1950, l’évacuation de Cao Bang et de Dong Khe est décidée

                                           

L’évacuation :

Le général Carpentier prévoit que le groupement « Bayard », aux ordres du Lieutenant-colonel Lepage, parte de Lang Son pour atteindre Dong Khe et que la garnison de Cao Bang, commandée par le Lt-Col. Charton  doit entamer son retrait et rejoindre le groupement « Bayard » à Dong Khe.

               La chute de Dong Khe :

              

             Fortin du poste de Dong Khe

Le 16 septembre 1950, le Vietminh attaque le poste de Dong Khe, tenu par 300 légionnaires : 5ème et 6èmeCies du 2ème bataillon, du 3ème REI), rapidement submergés par 10 000 Viets et une forte artillerie.

Le 18 septembre, le général Carpentier est en visite à Lang Son, lorsqu’il apprend la chute de Dong Khe ; cet évènement le confirme dans sa volonté d’évacuer Cao Bang au plus vite.           

Le 2 octobre 1950, le Lt-colonel Lepage reçoit l’ordre de contourner Dong Khe, aux mains de l’ennemi, pour rejoindre  Nam Nang, et recueillir la garnison de Cao Bang. Mais le Vietminh entame une large manœuvre d’encerclement, qui  oblige la colonne Lepage (Groupement Bayard) à se positionner à  Coc Xa, un large cirque au sommet d’une falaise calcaire. Cette cuvette ne présentait aucune échappatoire.

Le 6 octobre, les légionnaires  du 1er BEP restés en « rideau » devant Dong Khe, durement éprouvés par les combats, et le repli, du 4 octobre, rejoignent à leurs tours Coc Xa.

 

A Lang Son, le Lieutenant-colonel Lepage reçoit l’ordre de diriger le groupement « Bayard » vers That Khe, nouvel objectif. A Hanoï, le 1er BEP est mis en alerte. Les légionnaires sont parachutés sur That Khe les 18 et 19 septembre. Le 1er BEP avec à sa tête le commandant Segretain et le capitaine JeanPierre  comprend  497 parachutistes. Le Lieutenant-colonel Lepage décide finalement de garder le BEP à That Khe en réserve.

Mais l’attaque de Dong Khe est si rapide que les renforts du 1er BEP, n’ont pas le temps d’intervenir. Le 18 septembre, au matin, malgré une résistance acharnée, sans renfort, le poste de Dong Khe  tombe. Plus de 100 défenseurs ont trouvé la mort. Seuls 1 officier et 31 légionnaires parviennent à percer les lignes Viets et rejoindre That Khe. Les autres sont prisonniers.

De son côté, la colonne Charton, partie le 3 octobre, composée notamment de 600 légionnaires du 3ème bataillon du 3ème REI, progresse lentement sur la RCA. Arrivé devant  Nam Nang le 4 octobre, le colonel Charton apprend que la colonne Lepage, ayant subie d’énormes pertes à Dong Khe, ne viendra pas à sa rencontre.

   Livre « le rendez-vous manqué » de Serge Desbois:

« En fin d’après- midi du 6 octobre, le III/3REI, en queue de colonne se trouve sur la cote 590. Le Lieutenant-Colonel Charton reçoit l’ordre de se trouver le soir à Na Keo  et Lanca. Il faut donc marcher de nuit sur les lignes de crêtes sur une douzaine de kilomètres : col de Khan Be, cotes 783, 570, 590 et 477, nouveau lieu de rendez-vous avec Lepage. La queue de colonne sur 590, est durement attaquée par les Viets qui sont en train d’achever l’encerclement durant toute la nuit et veulent s’emparer de 590. »

Le 6 octobre, la colonne Charton arrive aux cotes 590 et 477 sans avoir subi trop d’accrochages rudes. Elle reçoit l’ordre d’y stationner, et c’est le groupement « Bayard » qui est chargé de forcer le passage par Coc Xa pour la rejoindre.  Le Lieutenant-colonel  Lepage confie au 1er BEP la mission de prendre l’étroit passage dans la muraille de calcaire de Coc Xa. Le 1er BEP ne compte plus que 350 légionnaires.

Dans la nuit du 7 octobre le 1er BEP se lance dans un combat d’une violence inouïe pour prendre le passage. Quand le jour se lève, le 1er BEP a perdu les 4/5ème de son effectif, tués ou blessés. Ce qui reste  de l’effectif, aidé par le 1er TABOR enlève l’objectif.

Les hommes du 1er BEP ne sont plus qu’une centaine lorsqu’ils rejoignent la colonne Charton.

Après la jonction du 7 octobre, le Lieutenant-colonel Charton tente une reconnaissance pour trouver un passage à l’est vers Ban Ca. Pris dans une embuscade, il est blessé et fait prisonnier. Le soir, face à la situation désespérée, le Lieutenant-colonel  epage donne l’ordre d’avancer, et de tout tenter pour rejoindre That Khe. Les 2 groupements se mettent en marche en plusieurs colonnes. Toutes sont accrochées par l’ennemi. Le Lieutenant-colonel Lepage est fait prisonnier.

Le commandant Segretain est tué. Les colonnes Lepage et Charton sont anéanties. Seuls 23 légionnaires du 1er BEP sont rescapés.

 

ORGANIGRAMME  DU  3° REI (incomplet.)

Chef de Corps : Colonel Constans,

Adjoint : Lieutenant-colonel Charton.

 

1er Bataillon – 2ème compagnie :

-        Capitaine Mattei

-        Capitaine Hippert (décédé en captivité le 25.10.1951)

-        Lieutenant de Laborderie (décédé en captivité le 17.09.1951)

 

2ème Bataillon – aux ordres du commandant Labaume) :

-        Capitaine Vollaire – 5ème Cie

-        Capitaine Jaugeon – 6ème Cie

-        Lieutenant Mozat – 7ème Cie

-        Lieutenant Bart – 8ème Cie

 

3ème Bataillon – aux ordres du commandant Forget – (tué le 7.10.1950)

-        Adjoint : Capitaine Labignette

-        Médecin : Asquasciati (tué le 7.10.1950)

-        Lieutenant Mattenet – 9ème Cie

-        Lieutenant Bonfils – 10ème Cie

-        Capitaine Maury – 11ème Cie (tué le 19.11.1952)

-        Capitaine Clamou – 12ème Cie

-        Capitaine Pages – CCB

 

1er Bataillon de partisans : 4ème CLSM – (capitaine Tissier)

-        Lieutenant Viltard – 136ème

-        Capitaine Morichere – 138ème

-        Lieutenant Danies – 140ème

-        Sous-lieutenant Mentec – 142ème (tué le 24.11.1950)

 

Compagnie non identifiée :

-        Lieutenant Philippe (tué le 8.10.1950)

-        Lieutenant Cinquin (tué le 7.10.1950)

-        Rondot (tué le 7.10.1950)

-        Lavault (tué le 7.10.1950)

 

Compagnie de parachutistes du 3ème REI (qui deviendra 1er BEP)

-        Lieutenant Morin

-        Lieutenant Audoye

-        Lieutenant Vion

 

1er BEP – aux ordres du commandant Segretain (tué le 9.10.1950)

-        Adjoint : Capitaine Jean-Pierre

-        Capitaine Garrigues – 1ère Cie (tué le 9.10.1950)

-        Lieutenant Lepage – 1ère Cie

-        Capitaine Tchiabrichvilli – 1ère Cie (tué le 7.10.1950)

-        Capitaine Bouyssou – 2ème Cie (tué le 5.10.1950)

-        Lieutenant Hochard – 2ème Cie

-        Lieutenant Meyer – 2ème Cie (tué le 3.10.1950)

-        Capitaine de Saint-Etienne – 3ème Cie – (tué le 5.10.1950)

-        Lieutenant Roy – 3ème Cie de Parachutistes Vietnamien (tué le 24.02.1952)

-        Lieutenant de Pelleterat de Bordes – CCB (tué le 7.10.1950)

-        Lieutenant Bechard – CCB (tué le 14.10.1950)

-        Lieutenant Faulques – peloton élèves gradés

-        Lieutenant Stien – Groupe de Partisans

-        Lieutenant Loth – Cie de renfort

-        Lieutenant Leducq – section 1 (évadé)

-        Lieutenant de Laborderie – section 2 (décédé en captivité)

-        Lieutenant d’Opposition – section 3 (prisonnier)

-        Lieutenant Denelle – DLO (prisonnier)

         Lieutenant Berthoud – Unité non identifiée

-        Lieutenant Marche – unité non identifiée

 

« Les 17 et 18 septembre, le bataillon saute sur That Khé afin de rejoindre le Groupement Lepage, parti de Lang Son pour secourir les éléments évacués de Cao Bang. Il est anéanti presque entièrement au cours des combats autour de Dong Khé. Ses pertes sont de 21 officiers, 46 sous-officiers et 420 légionnaires. Seule une trentaine parviendra à rejoindre les lignes françaises, dont le capitaine Jean-Pierre qui sera plus tard le chef de corps du 1er REP. » (Histoire du monde).

 

-        Lieutenant Resner - Cie non identifiée (tué le 7.10.1950)

-        Lieutenant Marce – Cie non identifiée

-        Lieutenant Berthaud – Cie non identifiée

-        Lieutenant de la croix-Vaubois – Cie non identifiée

-        Lieutenant Guyomard – Cie non identifiée

 

               ERREURS COMMISES (Histoire de l’Indochine):

-Si l’opération avait eu lieu un an plus tôt, elle aurait été plus aisée.

-Des indiscrétions en France ont permis au général GIAP de se préparer à l’attaque, dès l’émission du rapport du général Revers.

-L’évacuation de Cao Bang par la RC4, alors que la citadelle de Dong Khe était aux mains de l’ennemi, n’avait aucun sens.

Effectifs :

-Colonne Lepage: 2400- Colonne Charton: 2700- 1 BEP : 576- 3 BCCP : 640-

                              (Compris  Tabors, Goumiers et partisans Thais.)

Sur les mille neuf cents prisonniers des camps 2, 4 et 5 qui furent capturés sur la RC 4 entre septembre et octobre 1950, seulement trente-deux survivants regagnèrent le camp N° 1 en août 1952. Le taux de mortalité fut donc de plus de 90%. Il s’agit dès lors ici d’extermination rapide.              

Chiffre communiqué par l’ANAPI.         

 

Major (er) Hubert Midy  – caporal (er) Wilfried Schone– en charge de la mémoire. 

 

Mémoire vivante :

Mémoire vivante de cet épisode de la guerre d’Indochine par le président de l’Amicale « Vert et Rouge » le général Jean-Pierre Jacob:

«Notre doyen de l’Amicale "Vert et Rouge", le colonel Bernard Grué, fraîchement débarqué de Sidi-Bel-Abbès, commandait comme jeune lieutenant une section de la 5ème compagnie du 3ème REI.

Après avoir tenu puis évacué le poste 41-Est sous la pression Viet, il fera « Camerone » à Dong Khé (16-18 septembre 1950), plusieurs fois blessé, il va connaître la longue marche vers les camps et quatre longues années de captivité avec la poignée de survivants de l'assaut Viet.

Aujourd’hui, pensionnaire à l'Institut National des Invalides, il a été élevé le 9 décembre 2019 à la dignité de grand officier de la Légion d'honneur par le Président de la République.

Le colonel Grué a écrit un récit sobre et émouvant de son séjour en Indochine sous le titre révélateur de sa personnalité : "L'espoir meurt en dernier" aux éditions du Rocher (2013).

Amitiés légionnaires.»