Réflexions en cette fin 2019 et début d’année 2020, au moment où s’installent les réactions multiples sur les réformes des retraites: A quel âge est-on vieux ?

Pour les démographes on est vieux à 65 ans. C’est, bien entendu arbitraire surtout quand on sait que la véritable injustice de la vie est la santé et que notre âge ne cesse d’augmenter dans de meilleures conditions. Au moment  de quitter le service actif, nous sommes tous, nous les Anciens légionnaires, tentés par une crise existentielle qui consiste en une prise de conscience que les plus belles années de notre vie sont derrière nous.

Je retiens l’expérience menée par Becca R. Levy et son équipe sur des personnes « âgées » divisées en deux groupes. Au premier, on a présenté des mots positifs tels que « authenticité » ou « sagesse », l’autre groupe a été soumis à des mots à connotations négatives : « fatigue » ou « douleurs ». Conclusion: les participants ayant été sujets à des stéréotypes positifs marchaient plus vite et avaient une meilleure mémoire à l’issue de l’expérience.

Mais la vraie question que nous sommes en droit de nous poser est celle de nous interroger si notre société possède un minimum de considération pour ses vieux et pour elle, sont-ils des hommes ?

A voir la manière dont notre société les traite, il est permis d’en douter. Elle admet qu’ils n’ont ni les mêmes besoins, ni les mêmes droits que les autres membres de la collectivité puisqu’elle leur refuse le minimum que ceux-ci jugent nécessaire. Elle les condamne délibérément à la misère, aux taudis, aux infirmités, à la solitude, au désespoir. Pour apaiser leur conscience, des idéologues ont forgé des mythes très contradictoires, qui incitent les adultes à voir dans le vieux non pas leur semblable mais un autre. Il est le sage vénérable qui domine de très haut ce monde terrestre ou le vieux fou qui radote et extravague… Qu’on le situe au dessus ou en dessous de notre espèce, en tout cas on l’en exile. Mais plutôt que de déguiser la réalité, on estime encore préférable de radicalement l’ignorer: la vieillesse est un secret honteux et un sujet interdit.

Le malheureux sort des personnes âgées dénonce l’échec de notre civilisation occidentale: impossible de le concilier avec la morale humaniste que professe la classe dominante. Celle-ci n’est pas seulement responsable d’une « politique de la vieillesse » qui confine à la barbarie. Elle a préfabriqué ces fins de vie désolées, qui sont l’inéluctable conséquence de l’exploitation des siens, de l’atomisation de la société, de la misère d’une culture réservée à un mandarinat. Elles prouvent que tout est à reprendre dès le départ: le système mutilant qui est le nôtre doit être radicalement bouleversé. On évite soigneusement d’aborder la question du dernier âge.

Pourquoi ce propos ?

Imaginez, un instant que L’Institution des Invalides de la Légion étrangère ou la Maison du légionnaire n’existent pas. Quel sort serait alors réservé à nos pensionnaires qui n’ont pas les moyens de « s’offrir » un séjour en EHPAD ? La vieillesse à deux vitesses, dans le pays de la liberté, de la fraternité et de l’égalité de l’homme selon que vous soyez riches ou misérables… En cette nouvelle année, nous souhaitons nos meilleurs Vœux pour tous ceux qui ont la mission et le sacerdoce (FELE, FSALE) de s’occuper de «nos vieux» qui savent que la Légion n’abandonne jamais les siens et que ce n’est pas un vain mot. Une leçon pour une société égoïste assumée sans complexe envers et contre tout !

Bonne Année !

CM