Après 120 ans de présence, en juillet 1962, les légionnaires s’apprêtaient à quitter Sidi-Bel-Abbès à jamais. Avec une noble et martiale attitude qui les caractérise, ils tournaient à jamais le dos à leur terre de prédilection l’Algérie, sans un regard en arrière, les yeux fixés devant eux en chantant et en immortalisant la chanson d’Edith Piaf: “Non, rien de rien, je ne regrette rien!...”

 

Après l’octroi de l’indépendance, il y avait le défilé de la victoire des troupes que le FNL avait pu rameuter dans les environs. Ce jour là, les grilles du quartier Viénot étaient fermées, la sentinelle se tenait à l’intérieur, tous les légionnaires travaillaient.

Des heures et des heures, étaient passées et repassées les représentants du FLN devant les grilles en espérant que les légionnaires auraient assisté à cette démonstration de force.

Le 24 octobre 1962, les sept cents derniers légionnaires du 1er Etranger ont fait leurs adieux au quartier Viénot.

Au musée, était accroché un grand drapeau pris aux pavillons noirs à Tuyen Quang en 1885 en Indochine. Ce trophée de guerre, le donateur, le capitaine de Borelli, auteur du poème: “A mes hommes qui sont morts” avait spécifié: “ce trophée ne devra jamais quitter Bel-Abbés, si la Légion part, il faudra le brûler ! “

La Légion garde pour elle ses sentiments, elle s’interdit de juger, d’apprécier… les nécessités politiques. Le destin offrait une cérémonie, une étrange liturgie: l’incinération d’un drapeau chinois.

Ainsi ce soir là, sept cents hommes immobiles regardaient brûler une petit tas de soie, dans un silence absolu. Quand la dernière lueur s’éteignit, sept cents torches s’allumèrent… L’instant était solennel et surgissait du passé.

CM