La bataille du barrage tunisien va durer de la fin janvier à fin mai 1958.

 

L’A.L.N. multiplie les tentatives d’infiltration de ses katibas, qui quittent la Tunisie ou le Maroc chargées d’armes, à travers les barrages électrifiés.

A mi-janvier 1958, le général Raoul Salan met à la disposition du général Paul Vanuxem, commandant la zone Est-Constantinois, c’est à dire la zone du barrage tunisien, cinq régiments parachutistes ; le général Paul Vanuxem dispose donc de :

·       En avant du barrage, 4 régiments de couverture et de première interception, avec le 3e R.E.I. du colonel Gaumé à Mondovi, la 1ère demi-brigade de chasseurs alpins du colonel de Susbielle à La Calle, le 153e R.I.M.  du colonel Girard puis du lieutenant-colonel Delcros à Souk-Ahras en couverture, et avec le 26e R.I.M. du colonel Blanchard en première intervention à Morsott ;

·       Sur le barrage, 6 régiments blindés chargés de la herse, soit du Nord au Sud, le 31e Dragons du lieutenant-colonel Ritter à Morris Randon, le 18e Dragons du lieutenant-colonel Journes face à Duvivier, le 1er Spahis marocains du lieutenant-colonel Bonnot au sud de Sedrata, le 1er R.E.C. du lieutenant-colonel Spitzer puis du lieutenant-colonel de Blignères au nord de Tébessa, le 1er R.H.P. du lieutenant-colonel Compagnon  au sud de Tébessa et le 2e R.E.C. du lieutenant-colonel Ogier de Baulny à Négrine ;

·       En arrière, 8 régiments tissant une toile d’araignée du Nord au Sud : le 3e R.T.S. du lieutenant-colonel Jodin à Bône, le 151e R.I.M. du lieutenant-colonel Bravelet à Guelma, le 60e R.I. du lieutenant-colonel Trimaille à Laverdure, le 1er groupe du 8e R.A. du chef d’escadron Roux à l’est de Souk-Ahras, le 152e R.I.M. à Sedrata, le 4e R.E.I. du colonel Lemeunier dans les Aurès, le 44e R.I. à Tébessa, et le 6e Spahis marocains du lieutenant-colonel de Galbert à Bir-el-Ater.

·       De plus, en chasse libre, 5 régiments parachutistes sur les grands axes de pénétration : le 1er R.E.P. du lieutenant-colonel Pierre-Paul Jeanpierre avec le commando d’Extrême-Orient à Guelma, le 9e R.C.P. du lieutenant-colonel Pierre Buchoud à Souk-Ahras et Laverdure, le 14e R.C.P. du lieutenant-colonel Paul Ollion à Aïn-Beïda et Sedrata, le 8e R.P.C. du lieutenant-colonel Louis Fourcade à Tébessa et le 3e R.P.C. du lieutenant-colonel Marcel Bigeard à Youks-les-Bains.

·       Trois régiments d’artillerie apportent leur appui : le IV/8e R.A. du chef d’escadron Dubreuil, le 28e R.A. et le R.A.C.T.

·       En soutien ponctuel, le 2e R.E.P. du lieutenant-colonel Lefort et le 18e R.C.P. du lieutenant-colonel de Sarrazin, le 16e Dragons du lieutenant-colonel de Percevaux, le 6e Cuirs du colonel de Pontchara, le 4e Hussards du colonel Giraud et le I/21e R.T.A. sous les ordres de son chef de corps, le colonel Terce.

·       C’est entre Mondovi/Duvivier et Souk-Ahras qu’existe le créneau privilégié pour passer le barrage face au bec de canard du saillant de Ghardimaou où l’A.L.N. a une bonne partie de ses bases et de ses camps. Au nord du dispositif, le 1er R.E.P. et le 9e R.C.P. sont chargés des monts de la Medjerda qui conduisent aux Kabylies par les monts du Constantinois ; au sud, les 3e & 8e R.P.C. barrent la route qui, par les monts du Hodna, conduit de l’Aurès à l’Algérois ; le 14e R.C.P. prend à son compte la région des plateaux, des petits djebels aux environs de la Meskiana qui permettent de rejoindre l’un ou l’autre des itinéraires. Au centre du dispositif, le 1er R.S.M. met au point la herse mobile. Le colonel Boussarie, commandant du barrage, est chargé de l’alerte des régiments ; le colonel Craplet, adjoint opérationnel de la Z.E.C., coordonne l’action des régiments parachutistes car, sautant les hiérarchies et les lourdeurs territoriales, le général Paul Vanuxem lance ses colonels de choc, leur confiant un commandement tactique bien supérieur à leur grade ; il ne sera pas déçu.

 

Les combats les plus intenses vont se dérouler du 28 avril au 3 mai 1958 pendant la bataille de Souk-Ahras avec l’offensive du F.L.N. dite des 1 000. Une première katiba est détruite à Aïn-Thamimine, le 28 avril, par le 1er R.E.P., le 14e R.C.P., le 60e R.I., le 26e R.I.M., le 153e R.I., le 3e G.C.N.A. et le 31e Dragons. Le lendemain, quatre katibas tentent le passage dans la zone du 9e R.C.P. qui reçoit le premier choc sur le djebel el-Mouhadjène, avec 28 parachutistes tués. Le général Paul Vanuxem rameute toutes ses forces et prend le commandement sur le terrain : six bataillons d’infanterie (le III/60e R.I., le I/152e R.I.M., le II/153e R.I.M., un bataillon du 151e R.I.M., un bataillon du 26e R.I. et un bataillon du 3e R.E.I.), trois régiments parachutistes (1er R.E.P., 9e & 14e R.C.P.), un groupement blindé ; deux régiments parachutistes sont appelés en renfort : le 2e R.E.P. au repos à Philippeville et le 18e R.C.P.

Les légionnaires montent à l’assaut en criant ‘’Camerone’’ et en chantant ‘’le Boudin’’.

Pour l’A.L.N. 1 300 fellagha sont partis de Tunisie, 800 sont arrivés à la frontière, 620 sont mis hors de combat, 30 hommes armés arriveront dans les wilayas.

Les pertes des unités françaises sont de 47 tués et 68 blessés.

Pendant ces 4 mois de bataille du barrage à la frontière tunisienne, les pertes totales sont, pour l’armée française, de 273 tués et 736 blessés ; sur les 10 000 combattants qui tentent de pénétrer en Algérie, l’A.L.N. laisse au moins 4 000 tués et 600 prisonniers, 3 000 armes individuelles et 350 armes automatiques. Les pertes humaines des régiments engagés directement dans la bataille du barrage algéro-tunisien, depuis le 1er janvier, s’élèvent à :

·       Pour le 1er R.E.P. (900 hommes engagés pendant 132 jours) : 110 paras tués et 289 paras blessés ; mais l’A.L.N. laisse devant le 1er R.E.P. 1 275 H.L.L. mis hors de combat et un amoncellement d’armes : 92 mitrailleuses et F.M., 970 armes individuelles ; le général Paul Vanuxem décerne au 1er R.E.P. le titre honorifique de ‘’premier régiment d’assaut de l’armée française’’ ; mais le 1er R.E.P. perd son chef de corps, le lieutenant-colonel Pierre Jeanpierre, qui a façonné ce régiment, le 29 mai.

·       Pour le 9e R.C.P. (800 hommes engagés pendant 132 jours) : 48 paras tués et 61 paras blessés ; 32 parachutistes ont été tués lors de la Bataille de Souk-Ahras, fin avril

·       Pour le 14e R.C.P. (800 hommes engagés pendant 92 jours) : 16 paras tués et 59 paras blessés ;

·       Pour le 3e R.P.C.  (800 hommes engagés pendant 95 jours) : 12 paras tués et 14 paras blessés ;

·       Pour le 8e R.P.C. (800 hommes engagés pendant 152 jours) : 10 paras tués et 18 paras blessés ;

·       Soit pour l’ensemble des régiments parachutistes (4 100 hommes) : 196 tués et 441 blessés ;

·       Pour l’ensemble des autres régiments engagés (2 500 hommes) : 77 soldats tués et 295 soldats blessés.

De tels sacrifices ne doivent pas rester vains. Les chefs paras comprennent mal la réaction du gouvernement de la France après le bombardement de Sakiet Sidi-Youssef

"C'est le grand tournant de la guerre d'Algérie, le début de la phase dans laquelle l'initiative passe à l'Armée. Les forces militaires contrôlent dès l'été 1958 l'Algérie utile, celle des plaines et des régions à forte densité de population."

Le général Paul Vanuxem est limogé le 6 décembre 1958.

 

Jean BALAZUC P.P.P.P.

 

Sources :

 

La Guerre d’Algérie de Pierre Montagnon ;

Soldats du djebel de Porteu de la Morandière ;

Le Livre blanc de l’Armée française ;

Mémoire et Vérité des combattants d’A.F.N. ;

Histoire des Parachutistes français ;

La saga des paras du général Robert Gaget.

Histoire de l’armée française du général Weygand aux Editions Flammarion - 1961