"Le Médecin colonel (H) Jean-Louis RONDY s'est éteint dans la nuit du 21 au 22 juillet dernier à l'hôpital Percy (92), il nous a quittés et fait son dernier saut.

Ses obsèques avaient lieu Mercredi 29 juillet à 10H00 à Saint Louis des Invalides, la messe était suivie des honneurs militaires dans la cour d'honneur.

Nous avions à  cœur d'accompagner en sa dernière demeure, "notre Doyen", Grand officier de la Légion d'Honneur, Médecin en chef du 1°BEP à Dien-Bien-Phu, avec les  drapeaux de nos AALE.

Ainsi, en pensant à tous les légionnaires blessés à DBP qu'il a sauvés, nous lui avons rendu l'hommage qui lui était dû.

Fidèlement"

Général Rémy Gausserès

 

"Le Médecin colonel (H) Jean-Louis Rondy Médecin chef du 1er BEP à Diên Biên Phu (1926-2020). Pour beaucoup d’entre nous c’était le colonel Rondy. Pour notre confrérie de médecins ayant servi chez les légionnaires parachutistes, c’était «notre ancien, notre doyen». Que d’honneurs, que de récompenses résument à eux seuls sa carrière, ses carrières peut-on dire, Carrière de combattant à la fin de la 2ème Guerre. Engagé volontaire au Régiment de Marche du Tchad, il est allé de Paris jusqu’en Allemagne et a fêté à Berchtesgaden ses19 ans le 9 mai 45, lendemain de l’Armistice. De cette épreuve, Jean-Louis Rondy a gardé une culture de soldat. Carrière de médecin militaire,par la suite. Il est allé «au-delà des mers, toujours au service des hommes» comme l’énonce la devise de l’école de Santé Navale de Bordeaux où il a fait ses études jusqu’en 1952. Tous connaissent le médecin, qui, à peine sorti du Pharo, l’École d'application du service de santé des troupes coloniales à Marseille, fut à 27 ans le bien jeune toubib du 1er Bataillon étranger de parachutistes à Diên Biên Phu. «Se préparer au pire. Espérer le meilleur. Prendre ce qui vient». Avant même de séjourner en Extrême-Orient, il avait déjà fait sienne cette citation de Confucius. Son expérience de la 2ème Guerre mondiale lui a été bien utile lors de la construction de son infirmerie dans la cuvette tragique sur les hauteurs du point d’appui «Claudine». C’est une des rares structure qui résista au pilonnage vietminh durant la Bataille de Diên Biên Phu. Comme tous ceux d’Indochine, il a ramené ce «Mal Jaune» dont parlait Jean Lartéguy, qui n’était ni un ictère, ni la fièvre de la même couleur. Il a laissé là-bas tant de frères d’armes, tant de frères en réalité. Il rejoint aujourd’hui tous ses camarades. Ceux dont le regard s’éteignaitet avec lesquels tout était dit sans une parole. Ceux qu’il a dû laisser dans la boue du Nord Tonkin ou sur le bord des pistes tout au long des 700 kilomètres de sa longue marche.Ceux qui, au Camp N° 1, à bout de force ont lâché sa main. Ceux qui se sont abandonné à lui. Et tous ceux qui,ayant survécu grâce à ses soins, sont morts depuis. Rôle bien discret que celui du médecin militaire que d’accompagner ces moments tragiques d’une vie, souvent dans la solitude. Plusieurs de ses prédécesseurs aux BEP ont vécu, comme lui, le désarroi de la captivité ou de la blessure au combat. Pierre Pédoussaut, Charles Ehrhart, Jean-Louis Madeleine son camarade d’infortune de Diên Biên Phuou son infirmier Heinrich Bauer qui nous a quitté le 1er novembre dernier. Comme eux il s’interrogeait sur sa survie, alors que tant sont morts au combat. Pierre Montagnon écrit dans «Les parachutistes de la Légion»: «Ah, les toubibs ont aussi payé leur tribu dans les BEP! Leur job, il est vrai, les conduit plus souvent à l’avant qu’à l’arrière. C’est là que gisent les blessés». C’est là qu’il a inscrit avec les médecins des autres bataillons du Camp retranché, avec tous ses confrères d’armes d’Indochine, une page de dévouement, de sacrifice, d’humilité mais aussi de gloire qui, 66ans après, semble tomber dans l’oubli. Nous, nous ne l’oublions pas.

Bien que n’ayant été affecté «que» 7 mois au 1er BEP dont six mois à Diên-Biên-Phu, il a gardé de cette difficile et douloureuse épreuve un attachement indéfectible aux légionnaires parachutistes. Il les a servis avec «Honneur et Fidélité». Outre le béret vert des légionnaires du 1er BEP puis du 3ème REI, il a porté le béret rouge des para colo du 6ème Régiment parachutiste d’Infanterie de Marine. Il y est aussi resté fidèle. C’est bien là l’originalité des médecins militaires que d’avoir des épaulettes «réversibles» et des bérets de couleurs différentes dans le tiroir de leur bureau...Jean-Louis Rondy est allé ensuite en terre africaine «porter la science au pays des Bantous», comme nous l’avons tous chanté en quittant les amphithéâtres de nos écoles. Au Cameroun, en Centrafrique, auTchad, à Madagascar, œuvrant au profit des populations locales et confirmant son engagement de médecin de la «Coloniale», appellation non politiquement correcte aujourd’hui....Après avoir quitté le service actif, il apoursuivi «la mission» au profit des légionnaires et plus particulièrement ceux d’origine allemande.Il n’a eu de cesse que d’obtenir la reconnaissance due aux blessés d’Indochine ou d’Algérie. Il a aussi voulu transmettre son expérience aux plus jeunes. Il avait été profondément marqué par la mort au combat au Tchad en mars 1970 des médecins Guy Garcia et Michel de Larré de la Dorie. Il mettait en avance une certaine inexpérience du combat et une prise de risque liée à leur volonté de secourir. Il militait pour une réelle instruction militaire des médecins. Elle fait maintenant partie du «paquetage» des personnels du Service de santé qui partent en mission. Car malheureusement oui, l’ennemi tire sur l’ambulance! Et encore aujourd’hui. Elevé à la dignité de Grand officier de la Légion d’honneur en 2014, sa grande fierté était d’avoir été fait en 1985, 1ère classe d’honneur de la Légion étrangère et d’être membre du club «assez fermé», et c’est un euphémisme, des chefs de section para au feu. Il y retrouvait, dans la complicité de ceux qui «ont passé la portière», ses amis de longue date. Mais surtout le 30 avril 2018 il avait été le porteur de la main du Capitaine Danjou lors de la commémoration du 155ème  anniversaire du combat de Camerone. Les retraités que nous sommes,comme les jeunes élèves présents, et l’ensemble du service de santé ont tous été éclaboussés par la reconnaissance qui lui a été faite ce jour-là. Modèle de médecin-soldat comme on parlait des moines-soldats en évoquant les frères des ordres hospitaliers et militaires, il était le doyen des médecins légionnaires parachutistes, notre doyen. Nous nous devons de suivre son exemple. «More Majorum» est toujours inscrit sur nos monuments aux Morts. Pour lui qui a été à la fois parachutiste et pilote, il vient d’effectuer son dernier saut, son dernier vol. Mais cette fois il n’y aura pas de risque d’accident à l’atterrissage... Que tous ses camarades mais aussi Saint Luc, Saint Michel et Saint Antoine, qui sont «encore» les saints-patrons des médecins, des parachutistes et de la Légion, l’accueillent au grand bivouac de nos Anciens."

MG (2s) Francois-Marie Grimaldi