Ce qui constitue l’âme d’une nation est lié au passé mais aussi au présent. L’un est la possession commune d’un héritage d’histoire et de culture; l’autre se situe dans la volonté de vivre ensemble. 

Ainsi devraient pouvoir se conjuguer en harmonie le natal et l’adoptif, celui qui est « déjà là » et l’autre, venu d’ailleurs, lié à son pays d’adoption par une forme de contrat moral qui devrait déclencher naturellement un sentiment de reconnaissance. 

La notion de se nourrir de romantisme patriotique donne la propriété à tout « patriote » d’être    historiquement tributaire d’une civilisation, débiteur issu du monde qui le précède. Ainsi,  est-il ce citoyen conscient qui pense par lui-même, qui agit, qui ratifie et qui adhère à l’histoire de son pays qu’il fait sienne, digne représentant de son propre père et de ses très vénérables aïeux.  

Cependant ce dispositif est très fragile et peut même paraître paradoxal, la situation se voulant aujourd’hui noyée dans un monde devenu mondialisation et qu’il est bien difficile de situer sa place réelle  dans une Europe qui peine à se construire et où les diversités divisent. 

Comment avec le regard et les connaissances d’aujourd’hui, ne pas vouloir abandonner un passé qui n’est pas fait que de gloire, ni d’héroïsme, mais bien de sacrifices, de souffrances. Les épisodes embarrassants ne peuvent s’assumer correctement puisqu’il en ressort un constat d’une imbécillité navrante d’inhumanité. Nul ne peut contester que le vingtième siècle est celui des guerres industrielles, mais aussi, celui de la mort en masse, la puissance vertigineuse de l’arme atomique. Pour nos jeunes héritiers il serait grand temps de faire l’inventaire de l’histoire du monde et de tirer de bénéfiques  conclusions. Malheureusement, trop de haines et une indécente intolérance dominent  les sentiments, c’est d’autant plus délicat que les actes de violences politiques, religieuses ou financières ne font place à aucun dialogue.

A la gloire d’hier, aujourd’hui devrait succéder la honte, l’homme est un animal prédateur des plus efficaces. Le remord, effet secondaire du traumatisme provoqué par sa participation au mal n’est pas encore  ce qui le domine et pourtant sa coopération lors des deux guerres mondiales, son infernal bras destructeur dévoué à la cause ignoble d’hommes infâmes est inscrit dans la mémoire collective des nations. Aujourd'hui s'impose l’obligation de se souvenir, imbibé d’une espèce de roman d’histoire nationale où tous étaient "résistants", presque personne « collabo », très peu ayant, au bilan, participé  au scénario fertile en solutions finales.

Le passé rend malgré tout des comptes, il comparait devant le tribunal du présent avec des noms diabolisés (dans l'ordre des chiffres des morts: Moa,Staline, Léopold II, Hitler), l’Europe devient terre d’immigrations, il est tellement vrai que nous ne saurions nous isoler dans une bulle et regarder le reste du monde crever de faim.

Il nous faut tirer jusqu’au bout la leçon d’un siècle écoulé, le plus meurtrier de tous les temps pour tenter de rendre propre un devoir de mémoire parfaitement inconnu des jeunes générations. Il est tellement vrai que les nouveaux arrivants ne peuvent avoir le souci de s’enrichir de la connaissance de l’héritage historique nationale si tout est mis en sourdine.

 Dans cette France, divisée qui ne tient pas compte des abstentionnismes aux votes, dans une France où deux français sur dix choisissent leur président, l’histoire disparaît du bancs des écoles de la République en échange d’un programme où la vérité historique est discutable et soumise à une propagande partisane.

Le constat est simple et irrévocable, aujourd’hui, seule une vigilante critique exerce le pouvoir de mémoire, tout se discute, l’homme juge son passé avec les yeux d’aujourd’hui trop souvent par médias interposés...

On ne veut plus être à l’identique de ceux qui nous ont précédés, on ne puise plus dans le trésor des expériences acquises, mais, quand même, on s’arme contre un retour éventuel du monstrueux n’ayant pas retenu l’horreur : «  la guerre tue moins d’âme que la paix… ».

L’hymne de la patrie, révolutionnaire s’il en fut, n’a plus de sens si ce n’est sur un stade de foot: « Nous sommes ce que vous fûtes, nous serons ce que vous êtes », se transforme en : « Nous sommes autres que ce que vous fûtes car nous nous repentons pour ce que vous avez fait ou… laissé faire» et tout tient en trois mots : « Plus jamais ça ! ».

Comment serait-il possible, avec toutes ces interprétations du passé qu’une nation ne puisse pas être fragile ? De nouvelles interrogations et de fortes inquiétudes se font obligatoirement jour.

A l’heure de la mondialisation, la toute récente campagne présidentielle, ouvre des immenses bouleversements technologiques, économiques et démographiques qui définissent l’avenir dans lequel l’homme devra vivre. A la question posée maladroitement aux français : Qu’est ce que l’identité nationale ? Autrement dit : qu’est-ce que la France? Les réponses sont multiples et ne peuvent être satisfaisantes.

Nous sommes bien à la croisée d’un chemin, immense vertige de savoir qui nous sommes réellement, mais, au fait, en avons nous encore une identité nationale, est-il encore temps de faire un choix ? Il semblerait, en forçant notre légendaire lucidité naturelle de penser que nous ne puissions faire autre chose que de subir les maux d'une société bien malade. Aujourd’hui, à l’image de cette campagne présidentielle, on se contente de déblatérer sur les conséquences réelles de nos propres faiblesses au point d’en faire un enjeu politique, programme dominateur qui fait retrouver aux “petits candidats” de petites couleurs vives sans qu’ils ne soient réellement une sérieuse menace pour les deux boxeurs finalistes.

Les jeunes d’aujourd’hui devraient pouvoir faire un choix qui engagerait leur avenir, mais cela reste une vue d’esprit, une manière respectueuse de leur offrir la possibilité de choisir leur destinée au sein d’une nation dans laquelle ils se sentiraient intégrés, héritiers et fiers de leurs ainés… Vaste programme qui n’est pas prêt de se mettre en place, la société idéale n’existant tout simplement pas.

Il m’apparait pratiquement impossible de transformer celle que nous nous préparons à léguer à nos jeunes, je reste très pessimiste (pessimiste: un optimiste qui a de l’expérience) et surtout dans l’impossibilité d’avoir de vraies convictions politiques, tous ont dans leur campagne du bon et du mauvais, je m’appliquerais surement d’une manière un peu naïve de tenir compte que nous ne sommes que de passage sur cette terre qui n’a jamais appartenu à personne et certainement pas aux hommes de bonne volonté…

Nul doute que nous, anciens légionnaires, forts de nos expériences, nous seront toujours là, à notre modeste niveau, pour assurer notre rôle de veilleurs… Haut les coeurs !

CM

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